jeudi 30 décembre 2010

Les miracles (encore)

Ben oui, je suis désolé, mais les miracles se produisent, alors on en parle.
Pendant la nuit de Noël, par exemple, il s'en est produit un quelque part dans le Limbourg, à Diepenbeek, quand le toit d'une église s'est effondré sous le poids de la neige. Zéro mort. Zéro blessé. Un vrai miracle !
L'année 2010 a d'ailleurs été très riche en miracles. Quand on songe par exemple aux centaines de milliers de victimes en Haïti : il aurait pu y en avoir plus.
Et les mineurs chiliens ? Tous remontés sains et saufs. Un miracle aussi. Après deux mois, mais quand même : un miracle ! Bon, il paraît que depuis lors, certains ne peuvent plus faire l'amour que dans le noir, mais c'est un détail.
Autre miracle : bientôt un Belge en F1. C'est vrai que ça faisait longtemps. Plus longtemps encore qu'un Belge a remporté un grand prix. Mais le miracle, je trouve, ce serait le truc inédit : un Belge champion du monde de F1. Mais faut quand même pas rêver.
Le miracle, ce serait qu'en 2011 le Monde ne soit plus pourri par le fric. Là aussi, on peut rêver. Mais franchement, ce serait un vrai miracle, un miracle qui sauverait des millions de vies sans même qu'on en parle. Parce que des gens qui crèvent chaque année juste pour des questions de fric, il y en a des millions. Des malades qu'on ne soigne pas, des travailleurs surexploités, des familles entières abandonnées à leur misère, des guerres qui n'en finissent pas, des attentats...
Ne cherchez pas : le commun dénominateur de toutes les misères du monde, c'est la recherche d'un profit maximal.

Un des adjectifs qu'on utilise le plus mal, c'est le mot "inhumain". Un traitement inhumain, je trouve qu'il est très humain, au contraire. Il n'y a que les Hommes pour faire ça. Les bêtes ne font pas ça. D'ailleurs, "bestial", ça ne s'adresse jamais qu'à une seule espèce animale aussi : à l'Homme.

Je souhaite une année 2011 un peu moins "humaine" que la précédente. Une année pour la Vie, pour la Justice, pour l'Amour et pour la Paix. Et pour que les Hommes soient enfin des Hommes.

"All you need is love" (John Lennon)


Edit :

Pour finir l'année 2010 en beauté, un dernier miracle s'est produit.
Le dramatique incendie qui vient de détruire la partie la plus ancienne (XIIIè s.) de l'abbaye sistercienne de Rochefort a néanmoins, malgré des dégâts déjà estimés à plusieurs millions d'euros, épargné les moines, la bibliothèque et... les très précieuses cuves de la brasserie* ! Alleluia !

* Les desseins du Très Haut sont décidément insondables.

vendredi 24 décembre 2010

Dans le bureau du PDG


— Mais… heu…
— Entrez ! Entrez, donc, monsieur Schmurtzl. Je vous attendais !
— Mais… mais… Mir ! Qu’est-ce que vous faites dans mon bureau ?
— Allons, monsieur le directeur, détendez-vous. Et entrez, donc. Je ne vous fais pas peur, tout de même ?
— Écoutez, Mir, si c’est une plaisanterie, je la trouve de très mauvais goût.
— Ne soyez pas nerveux, monsieur Schmurtzl, asseyez-vous et…
— Ah ! Mais… En voilà assez ! Je ne sais pas comment vous êtes entré ici, mais…
— Par la porte, monsieur, par la porte…
— Eh bien, sortez ! Immédiatement !
— Voyons, mon cher, calmez-vous. Pensez à votre tension.
— Ne vous occupez pas de ça. Et pour commencer, ôtez vos pieds de mon bureau !
— On est bien, comme ça, je trouve. Vous devez le faire fréquemment, non ?
— Nom de… Mir ! Pour la dernière fois, sortez !
— Il est bien, votre fauteuil. C’est du vrai cuir, n’est-ce pas ?
— N’abusez pas de ma patience…
— Vous ne répondez pas à ma question.
— Qu’est-ce que vous voulez, Mir ? Votre lettre de licenciement, c’est cela ?
— Tout de suite les grands mots.
— Ah, mais ! Ça suffit, hein ! N’abusez pas de ma patience, sinon…
— Des menaces, en plus !
— Bon. Vous l’aurez voulu… Mademoiselle Viroux… Mademoiselle Viroux…
— Elle ne répond pas ? Vous êtes sûr qu’il marche, votre interphone ?
— Mademoiselle Viroux !
— Mais enfin, monsieur Schmurtzl ! Ne poussez pas comme ça sur ce bouton ! Vous entendez bien que ça sonne dans le bureau à côté ! Si votre secrétaire était là, elle vous répondrait !
— Elle n’est pas là, c’est ça ?
— Vous n’avez pas vérifié ?
— Je suis entré ici directement. Et vous, vous allez en sortir immédiatement. Considérez-vous comme licencié sur le champ, Mir ! Vous m’entendez ? Vous êtes viré ! Sacqué ! Jeté pour faute grave. Vous êtes content, comme ça ?
— Vous devez me le signifier par lettre recommandée, monsieur Schmurtzl.
— Vous l’aurez, rassurez-vous. Dès que ma secrétaire arrive, je la lui fais dactylographier.
— Vous êtes sûr qu’elle viendra ?
— Qu'est-ce à dire ?
— Je crains que vous n’ayez à rédiger vous-même ma lettre, monsieur Schmurtzl.
— Cessez vos impertinences, Mir ! Et pour la dernière fois, quittez ce siège et ce bureau !
— Bah ! Prenez donc une autre chaise. Ou installez-vous à la place de mademoiselle Viroux. Vous n’aurez qu’à allumer son PC pour rédiger ma lettre. Vous savez vous servir d’un traitement de texte, au moins ?
— Espèce d'impertinent ! Vous ne vous imaginez quand même pas que ça va se passer comme ça ? Ah ! Vous voulez un recommandé ! Eh bien, vous allez l'avoir ! Il n'y a pas que ma secrétaire qui peut s'en charger.
— Oui, c'est cela. Téléphonez donc à la DRH.
— Mir, vous êtes grossier !
— Pas tant que ça. Vous, par contre...
— Monsieur Mir, je ne sais pas ce qui me retient de... de...
— Heu... Mes cent kilos et mon mètre quatre-vingt-huit, peut-être ?
— Très bien. Puisque vous avez décidé de vous accrocher ici, je me rends moi-même auprès de madame Sprontz.
— Mais enfin, monsieur Schmurtzl, vous savez bien que la DRH est en congé de maladie !
— De maladie ?
— Elle doit subir une intervention chirurgicale cette semaine. L'auriez-vous déjà oublié ?
— Ah oui ! C'est vrai ! Mais qu'importe. Monsieur Cafarelli se chargera très bien de votre cas.
— Ça m'étonnerait !
— Pardon ?
— Je dis : ça m'étonnerait !
— Et pourquoi, je vous prie ?
— Parce qu'il n'est pas là.
— Lui non plus ?
— Exactement. Il n'est pas là. Personne n'est là.
— P... personne ? Vous vous payez ma tête, Mir ?
— Vous êtes passé par les bureaux ?
— Je vous ai dit que j'étais entré ici directement.
— Donc, vous n'êtes pas passé par les bureaux. Vous ne passez jamais par les bureaux, même pas uniquement pour nous dire bonjour le matin. Vous n'y venez que pour nous houspiller.
— Je n'ai pas que ça à faire, figurez-vous !
— Certes. Mais vous pourriez faire l'effort. Surtout que vous arrivez bon dernier chaque matin. Enfin ! Quand je dis chaque matin...
— Ce ne sont pas vos affaires !
— Mais ce matin, inutile de parcourir les bureaux, donc. Vous n'y verrez personne.
— Personne ?
— Absolument personne.
— Une grève, c'est ça ?
— Pas du tout.
— Un complot ? Un coup monté ?
— Non plus. Personne ne viendra. Ni aujourd'hui, ni demain, ni le reste de la semaine.
— Qu'est-ce à dire ?
— Que vous êtes seul.
— Une rébellion ?
— Une prise de conscience collective. Une décision mûrement réfléchie. Désormais, vous vous débrouillerez sans vos vingt-quatre appointés que vous traitez comme de la merde.
— Qu... quoi ?
— Asseyez-vous, mon cher. Tenez. Je vous rends votre fauteuil. Moi, je m'en vais. J'ai dit ce que j'avais à vous dire.
— Mais... mais...
— Vous me ferez parvenir ma lettre de licenciement dès que vous aurez retrouvé vos esprits, monsieur Schmurtzl. Et quelqu'un pour la rédiger, bien entendu.
— Mais... mais... Ça ne se passera pas comme ça !
— Oh ! Que si ! Adieu, monsieur Schmurtzl.
— Mir ! Attendez !
— Quoi ?
— Des explications ! Que se passe-t-il ? Il n'y a vraiment personne, ce matin ?
— Les ouvriers sont là, ne vous en faites pas.
— Ah.
— Vous savez quel jour nous sommes ?
— Lundi ! Quelle question, Mir !
— Je veux dire : quel jour du mois...
— Heu...
— Je vous rappelle que l'ordre de virement pour la paie des ouvriers doit partir aujourd'hui.
— Et...
— Et comme il n'y a personne à la GRH et aux finances, et que les informaticiens m'ont chargé de couper les serveurs... Ce qui est fait, vous pensez bien !
— Merde, Mir ! Vous jouez à quoi, là ?
— À rien, monsieur le directeur. À rien.
— Mais... si les ouvriers ne sont pas payés, on va avoir un arrêt de travail.
— Vous allez avoir un arrêt de travail, oui.
— Et la RXT623 MkII ? Nous avons des délais à respecter !
— Je sais.
— Les Luxembourgeois nous ont déjà signalé qu'ils réclameraient des pénalités en cas de retard.
— Ils ne sont pas tendres, ceux-là, en effet ! Oui, c'est cela. Asseyez-vous donc, monsieur Schmurtzl, ça vaudra mieux. Vous voulez une serviette pour vous éponger ?
— Ah ! Ne vous foutez pas de moi, Mir ! Qu'est-ce que vous voulez, hein ? Qu'est-ce qu'il vous faut ? Votre indexation, c'est ça ?
— Oh ! L'indexation...
— Je n'aurais pas dû vous la refuser, je sais.
— Nous LES refuser, monsieur Schmurtzl. Nous LES refuser.
— Oui, oui. On ne va pas ergoter. Je peux vous LES accorder. Voilà.
— Toutes ?
— Oui.
— Avec effet rétroactif ?
— N'exagérez pas, Mir !
— De toute façon, c'est trop tard. Les vingt-quatre lettres de démission sont parties ce matin. Je les ai postées moi-même avant de venir. Par recommandé, bien sûr.
— Par... par recommandé ?
— Oui, épongez-vous avec votre mouchoir.
— C'est... c'est un complot !
— Non, c'est une démission collective.
— Mais pourquoi ? Pourquoi ? Ce n'est quand même pas le refus de l'indexation qui...
— Mais non, mon cher Schmurtzl ! Mais non ! Il n'y a pas que ça. Il y a aussi les congés que nous ne pouvons pas prendre, les heures supplémentaires que nous ne parvenons pas à récupérer et que vous refusez de nous payer...
— Mais... Comment allez-vous faire ? Si vous démissionnez tous, vous n'aurez pas droit au chômage ! Il y a des mères de famille, dans le personnel.
— Eh oui !
— Et... et quoi ? C'est tout ce que ça vous fait ?
— Et à vous, Schmurtzl ? C'est tout ce que ça vous fait ? Avez-vous jamais pensé à nous ? Aux mères de famille que vous venez d'évoquer ? À tous ceux parmi nous qui ont du mal à nouer les deux bouts ?
— Ce n'est pas facile pour moi non plus, que croyez-vous !
— Certes. Votre propriété à Cannes, votre vedette de quinze mètres, votre appartement de luxe à Paris, votre quatre-fois-quatre full options, la décapotable et les toilettes de madame Schmurtzl, ça doit vous coûter bonbon !
— N'ironisez pas !
— Non, je compatis. Et maintenant, je m'en vais.
— Que... qu'allez-vous faire, à présent ? Vous avez trouvé du boulot chez un concurrent, c'est ça ?
— Pas du tout. Je m'en vais. Nous partons tous. Nous avons un gros, un très gros chèque à encaisser. Nous l'avons gagné en mettant des petites croix sur un bout de papier. Et même partagé en vingt-quatre, ça reste foutrement intéressant. Adieu, monsieur Schmurtzl. Non, non, ne me raccompagnez pas. Je connais le chemin.



(Ben quoi ? Moi aussi, j'ai le droit de rêver, non ?)

mercredi 22 décembre 2010

Les Nouveaux Auteurs (suite)

En complément à mon message d'hier et avant que certains ne me prennent pour cible d'une vilaine fatwa ; voici quelques précisions et considérations plus sérieuses. Si, si, je peux être sérieux. Pas longtemps, mais je peux.
Je ne crache pas sur le système mis en place par Les Nouveaux Auteurs. Ce système en vaut d’autres.
Les NA ne prennent guère de risque en faisant opérer le tri par un comité de lecture « citoyen ». Le procédé est peu coûteux et ils peuvent estimer à juste titre qu’un manuscrit ayant séduit les dix à quinze lecteurs qui ont été invités à l’évaluer a certainement des qualités, en tête desquelles un bon potentiel commercial. Il leur reste alors à se pencher eux-mêmes sur les romans les mieux notés et à prendre leurs décisions.
Le reste sera affaire de promotion et de distribution ; et je ne crois pas que les heureux élus auront à s’en plaindre. Ils seront par contre liés pour 5 ans (ou cinq romans) avec les NA ; et même si leur bouquin se vend à plusieurs milliers d’exemplaires, leurs manuscrits suivants devront passer par le « comité de lecture citoyen » !

Comment faire partie du Comité de Lecture Citoyen ?

Il suffit de vous inscrire sur le site Les Nouveaux Auteurs et de compléter le formulaire en ligne accompagné de quelques mots exprimant votre motivation (n'ayez pas peur, les exigences sont... heu... peu élevées).

Que se passe-t-il ensuite ?

C'est simple : vous recevez, sur support papier (attention : ce mode de transmission n'est plus d'actualité - voyez cet article ), des manuscrits à lire, noter et commenter. Vous choisissez le rythme auquel ils peuvent vous être envoyés.
Quand vous avez terminé, vous complétez, en ligne sur le site des NA, la fiche de lecture du mansucrit.
Vous devez résumer le roman et donner vos appréciations sur le scénario, les personnages, l'écriture...
Vos commentaires seront publiés en temps utile sur le site des NA.
Outre le résumé et votre appréciation chiffrée, voici les principales indications que vous devrez donner à propos du manuscrit que vous venez de lire :
- En une phrase :
- J'ai particulièrement apprécié :
- Pourquoi cette note :
- Mon sentiment sur le titre du livre :
- Ce que je pense des personnages :
- Ce que je pense du thème général du livre :
- Ce livre ferait-il un bon film :
Il vous sera également demandé si vous seriez d'accord de relire et réévaluer le manuscrit si l'auteur décidait de le modifier.

Et ensuite ?

Votre fiche de lecture sera jointe à celles des autres membres ayant noté et commenté le même manuscrit. Chaque manuscrit est commenté par dix à quinze personnes, environ, et la note globale obtenue est la moyenne de toutes celles qu'il a reçues.
Certains romans reçoivent moins de dix fiches de lecture, d'autres près d'une vingtaine. Il arrive fréquemment que des fiches ne rentrent pas, c'est ce que les NA appellent des "abandons de lecture".

Que faut-il penser du Comité de Lecture Citoyen ?

A priori, l'idée semble intéressante. Les auteurs obtiennent un "retour" sur leur travail, des commentaires qui peuvent, éventuellement, les aider à progresser.
Il ne faut toutefois pas perdre de vue que les membres du comité sont des amateurs de lecture et non des critiques littéraires, des éditeurs ou des spécialistes de la grammaire. Vous recevrez donc pour votre manuscrit des commentaires divers, mais pas toujours instructifs. La plupart du temps, vous saurez sans problème si votre prose a plu, déplu ou laissé indifférent ; mais vous aurez parfois du mal à comprendre pourquoi. Il est facile de dire qu'on aime ou qu'on n'aime pas quelque chose, mais en expliquer les raisons est une autre paire de manches.
Il y a parmi les membres des gens aimables et compétents, qui vous livreront poliment leur ressenti et avec lesquels vous serez peut-être heureux d'échanger quelques messages. Beaucoup commettront des fautes de grammaire et d'orthographe ; mais s'ils s'expriment clairement, c'est l'essentiel. Eux lisent, tandis que vous, vous écrivez.
Il y a malheureusement aussi dans le comité des personnes totalement incompétentes, incapables d'écrire deux phrases sans massacrer la langue française, et dont vous n'êtes même pas sûr qu'ils ont lu votre manuscrit et s'ils l'ont fait, s'ils y ont compris quelque chose. Le comble est que ce sont invariablement ceux-là qui se montrent les plus sévères dans leurs notes.
Le "tout venant" des lecteurs se montrera courtois, mais ne donnera dans ses commentaires que des lieux communs ou de vagues reproches, parfois contradictoires au demeurant. À vous de faire le tri !
Il est évident que si plusieurs lecteurs soulignent le même défaut, vous connaîtrez les points à améliorer ; mais c'est plutôt rare. Souvent, les avis divergent.
Enfin, vous devez savoir également que les notations sont fortement subjectives. Certains s'interdiront de remettre un 10/10, pour eux synonyme d'une perfection qui n'existe pas, alors que d'autres l'utiliseront avec enthousiasme, soucieux de faire le maximum pour voir triompher le manuscrit qu'ils ont lu !
On trouve donc de tout sur ces fiches de lecture. Si vous voulez vous en rendre compte, lisez-les sur le site de l'éditeur.
Mais si vous voulez découvrir tout de suite un florilège de commentaires, rendez-vous sur cette page :

Commentaires Citoyens

Ne manquez pas non plus la suite de mon aventure chez Les Nouveaux Auteurs.

mardi 21 décembre 2010

Les Nouveaux Auteurs

Ami scribouillard lassé d'être remballé comme un pet sur une toile cirée par les éditeurs auxquels vous avez eu l'optimisme d'adresser votre manuscrit, peut-être ne connaissez-vous pas Les Nouveaux Auteurs ?

Camarade forçat du traitement de texte et du précis de grammaire, si vous en avez ras la casquette des formules toutes faites du genre « bla bla bla toute notre attention », suivies de « malgré les qualités bla bla bla », enchaînées sur « nous sommes au regret de bla bla bla » ou autres « bla bla bla ne correspond malheureusement pas à notre ligne éditoriale bla bla », pour se terminer par « bla bla bla bonne chance bla bla bla réussite bla bla votre recherche bla bla bla », Les Nouveaux Auteurs vous tendent les bras !

Car, très cher collègue d'infortune, si se voir opposer un « niet » plus ou moins bien enjolivé n'a rien de réjouissant, n'en pas comprendre le pourquoi est une grande, une très grande frustration.

Quel est donc cet obscur « comité de lecture » qui a décidé de vous envoyer paître ? Avec quel(s) derrière(s) distrait(s) ces gens ont-ils parcouru votre prose ? Et l'ont-ils seulement lue ?
Vous n'en savez rien. Aucune explication. Des formules toutes faites.

Si vous voulez que ça change, si vous voulez des avis éclairés sur votre travail, n'hésitez pas à consulter Les Nouveaux Auteurs. Leur comité de lecture est « citoyen ».

Mais qu'est-ce qu'un Comité de Lecture Citoyen ?
C'est un groupe de lecteurs ordinaires ; des Madame, des Mademoiselle et des Monsieur Toutlemonde ; plusieurs centaines d'anonymes parmi les acheteurs potentiels de bouquins. Ce sont eux, ces volontaires, ces amateurs de littérature, qui jugeront votre roman en avant-première et remettront des fiches de lecture notées et commentées.

Au diable l'obscur comité de lecture ! Le système est transparent. Les Nouveaux Auteurs éditeront chaque année, essentiellement dans le cadre de deux ou trois concours, une demi-douzaine de romans : ceux qui auront reçu les meilleures notes.
C'est le public qui choisit. C'est lui qui se prononce. Et quoi de plus normal ? N'est-ce pas ce même public qui achète les livres ?

Que vous figuriez parmi les quelques heureux élus ou les nombreux autres, vous recevrez vos fiches de lecture, ce qui est quand même intéressant !

Mais comment être un heureux élu ?
C'est facile. Il suffit d'écrire un bon bouquin, bien corrigé, bien présenté ; et de le faire parvenir aux Nouveaux Auteurs. S'il franchit l'obstacle du premier tri sommaire, votre manuscrit sera évalué par le Comité de Lecture Citoyen. Et là, vous n'aurez plus qu'à croiser les doigts.
Comme on ne peut pas plaire à tout le monde, vous devrez espérer que ceux qui aimeront votre livre lui accorderont des notes maximales et que ceux qui ne l'aimeront pas se montreront magnanimes.

Les romans qui émergeront sont probablement de bons romans ; mais ce n'est pas pour ça que ceux qui n'émergeront pas sont moins bons ou mauvais.

Participez, et vous aurez droit à vos fiches de lecture plutôt qu'à un refus sans explications.
Mieux : ces fiches seront publiées.
Si un avant-goût de la chose vous tente, courez donc sur le site de Les Nouveaux Auteurs et prenez connaissance des divers commentaires remis par les membres du Comité de Lecture Citoyen.


Mais commençons par le début...


Comment faire pour participer ?


1.— Faire parvenir son manuscrit, sous format numérique, avant la date limite de participation (généralement le 30 novembre), en complétant le formulaire en ligne (bien lire les conditions de participation !). Un accusé de réception avec confirmation d’inscription au concours est envoyé par retour de courriel.


2.— Quelques semaines après clôture des inscriptions, l’auteur reçoit un courriel l’informant de sa sélection ou de son élimination après le premier tri (Les Nouveaux Auteurs annonçaient plus de 600 participants lors des deux dernières éditions, et un minimum d'une soixantaine de manuscrits sélectionnés pour être évalués par le Comité de Lecture Citoyen). En cas de sélection, l’auteur doit confirmer qu’il détient toujours bien tous les droits sur son roman. Sur le site de l’éditeur, le statut de son manuscrit, qui était en attente de décision, est renseigné comme étant en cours de notation.


3.— Passé ce cap, plus d’informations pour les auteurs. Les demandes par courriel reçoivent des réponses laconiques. Les candidats attendent, se posent des questions, stressent, échangent leurs craintes et leurs espoirs sur les forums…


4.— Les auteurs des manuscrits ayant reçu les meilleures notes du CLC sont contactés par téléphone (et dans le plus grand secret). On les avertit qu’ils sont « finalistes » et qu’ils pourraient devenir lauréats d’un des prix en jeu, mais que pour continuer l’aventure, ils doivent d'abord signer un contrat d’édition chez Les Nouveaux Auteurs. C'est le côté obscur de la manoeuvre : le contrat ne garantit a priori aucun volume de tirage, aucune promotion spécifique. Bizarrerie ? On peut se demander combien il y a de « finalistes », mais des chiffres sûrs ne sont pas claironnés. Une dizaine par concours, selon les rumeurs, mais deux ou trois seulement seront vainqueurs. Ces vainqueurs seront édités et diffusés à dix voire vingt mille exemplaires, avec publicité à la clé, les autres finalistes seront édités « suivant la demande ».


24 mars 2012 : Vous trouverez là-bas une importante mise à jour concernant ce point numéro quatre.



5.— À moins que ces conditions n'aient été récemment modifiées, un auteur édité chez Les NA s'engage pour 5 ans ou 5 romans (premier terme atteint) et ne touche pas de droits sur les cents premiers exemplaires vendus.


6.— Les auteurs qui ne reçoivent pas de nouvelles par téléphone peuvent parfois obtenir leurs notes par courriel, avec un message du genre « vous n'avez pas démérité, mais la moyenne de vos notes est insuffisante pour vous proposer un contrat... »


7.— Après la proclamation des résultats, les notes et les fiches de lecture sont publiées. Le candidat peut donc prendre connaissance des « commentaires citoyens » et en tirer les enseignements qu'il désire. J'ai récolté quelques critiques édifiantes, sur le site des Nouveaux Auteurs, et je les ai compilées là-bas.


8.— Un manuscrit non édité peut néanmoins être « réservé » sur le site des Nouveaux Auteurs. Si les demandes sont suffisantes, l'auteur pourrait donc se voir offrir quand même un contrat. Il s'agirait d'édition à la demande, donc.


En résumé :


Les Nouveaux Auteurs a trouvé un système pour trier à bon compte les centaines de manuscrits qu'il reçoit. Il confie le boulot à des amateurs, en se disant qu'un roman qui a plu à une quinzaine de lecteurs possède fatalement un bon potentiel commercial, à défaut de véritables qualités littéraires. Il lui reste à choisir lesquels éditer et promouvoir parmi les meilleurs.


J'ai remarqué également cette particularité du système de vente organisé par l'éditeur.



J'ai également noté qu'un ancien lauréat ne bénéficie d'aucun régime de faveur pour ses romans suivants : ils doivent passer par le Comité de Lecture Citoyen. Si les notes sont bonnes, la promotion semble suivre efficacement.


Mais qu'est-ce que ce Comité de Lecture Citoyen ? Comment en faire partie ? Comment fonctionne-t-il ?
Ne manquez pas la suite de cet article :
Les Nouveaux Auteurs (suite)


N'hésitez pas non plus à lire les interventions et témoignages apportés par d'autres que moi en commentaire du présent article. Les choses évoluent depuis 2010, l'éditeur adapte ses contrats et ses méthodes, comme le rapportent quelques intervenants.

Et si vous vous posez des questions sur le monde de l'édition en général, ne manquez pas : Les pièges de l'édition.

lundi 13 décembre 2010

Aldi vous souhaite de joyeuses fêtes !


J'avais décidé de parler de choses rigolotes en envisageant de prendre notre gouvernement comme sujet du présent billet. Mais voilà : ce n'est pas rigolo. Parce que nous retrouver sans gouvernement six mois après les élections, alors que notre pays assure la présidence du cirque européen, ce n'est pas marrant. Même si on compare avec la Côte d'Ivoire qui a déjà réussi à en former deux quelques jours à peine après le scrutin. Ce n'est pas marrant, et d'ailleurs la plaisanterie a déjà été faite.
Ce n'est pas rigolo non plus d'objecter que nous avons quand même un gouvernement : le gouvernement démissionnaire le plus longuement en place de notre histoire. Je ne sais pas si tous les records sont tombés, mais on est en bonne voie ; et, comme se plaisait à le souligner notre Eddy Merckx National, les records sont faits pour être battus.
Non, ce n'est pas rigolo. Et même si ça l'était, toutes les plaisanteries ont déjà été faites. Donc, ce n'est plus rigolo. D'ailleurs, je ne vois pas pourquoi on se gausserait de nos élus. Pensez un peu à la vie de ces pauvres bêtes malheureux représentants du peuple : de colloque en réunion, de conseil en conférence de presse, de sommet en tête-à-tête, de débat en séminaire... tous se partagent ou se refilent tant et tant de tâches ingrates à accomplir pour un salaire de misère !
Car là est le problème : nos élus sont mal payés. Ah ! si comme moi ils bénéficiaient de confortables émoluments, ils seraient contraints à une certaine productivité. Moi, si je présentais un rendement aussi médiocre que le leur, mon patron m'aurait déjà viré depuis longtemps ! Mais je suis bien payé, moi. Ceci expliquant cela.
Ce n'est pas rigolo, n'est-ce pas ? Je vous avais prévenus.
Profitant d'un jour de congé (payé ! un scandale !), je suis allé faire quelques provisions dans ma boutique de luxe favorite, aux tarifs très en rapport avec mon salaire. J'ai réussi à y dépenser quelque 129 euros (je vous laisse imaginer le poids du chariot). Lors du décompte final et au moment de récupérer un peu de monnaie, j'ai bien vu, à la tête de la caissière, qu'il y avait un os. Je vous mets ci-après une copie du bas du ticket.



Si le gérant appelé à la rescousse avait bien voulu me verser la somme promise en retour, l'inscription « Votre équipe Aldi vous souhaite une joyeuse fête de Noël » aurait pris tout son sens. Hélas ! Il n'a pas voulu !
Que voulez-vous ? C'est la crise, mon bon monsieur !

dimanche 12 décembre 2010

Pneus hiver

Les pneus « hiver ». Voilà encore une bonne idée ! Vraiment, nous vivons une époque formidable : le moindre problème surgit... et hop ! Des idées géniales pour le résoudre font surface.
Alors, quand il y a de la neige, pour éviter la pagaille intégrale sur nos routes, il suffit que tout le monde équipe sa voiture avec des pneus adaptés aux conditions hivernales. De la gomme plus molle, qui ne durcit pas même quand la température descend sous les sept degrés Celsius.
D'ailleurs, les Allemands (notre modèle actuel, je vous le rappelle) l'ont parfaitement compris qui ont imposé l'usage de ce type de pneus dès le mois de décembre de cette année. Il suffit de faire ça chez nous, en Belgique, et tout ira mieux. Finis les dérapages, les sorties de route intempestives, les bouchons endurcis : le pneu « hiver » va tout résoudre. Il faudra en avoir en stock, bien entendu, mais ce n'est qu'un détail. Les fabricants fourbissent leurs armes en attendant d'actionner le tiroir-caisse.
Je ne sais pas depuis combien d'années vous parcourez les routes au volant d'une voiture, mais en ce qui me concerne, ça fait plus de vingt ans. Jadis, les hivers n'étaient pas moins rudes, mais les voitures étaient infiniment plus basiques : pas d'antipatinage, pas d'antiblocage de freins, zéro aide à la conduite... Les pneus étaient moins performants. Et il n'était pas question de gommes hivernales, sauf si vous étiez un fanatique des sports de glisse : pneus cloutés, chaînes ou pneus « neige » étaient à votre disposition. Et obligatoires en montagne dans certaines régions. C'était raisonnable.
Avec ma bête voiture piètrement équipée, sans aides électroniques à la conduite, avec des pneus « été » (comprenez : des pneus « pluie »), je roulais quand même. Quand il avait bien neigé, c'était parfois ennuyeux : quelques accidents, quelques bouchons... Mais on s'en sortait généralement assez bien.
Aujourd'hui, quatre flocons et c'est la cata. Plus rien ne va. Et pourquoi ?
Eh bien, c'est la faute à nos pneus. Il faut mettre des pneus « hiver ». Et comme nous sommes négligents autant qu'avares, il faut les rendre obligatoires. Absolument ! Obligatoires. Du premier décembre au premier mars. Et si vous n'en mettez pas sur votre voiture, vous devrez la laisser au garage tout l'hiver. Pas dans la rue, hein ! Au garage. Ou dans votre jardin. Parce que je vous rappelle qu'il est interdit de laisser un véhicule plus de vingt-quatre heures à la même place sur la voie publique. Donc, pour être autorisé à le déplacer en plein hiver, vous devrez l'équiper de gommes adaptées.
Avec des pneus « hiver », ce sera le miracle (eh oui, un de plus !). Il faut suivre le « modèle allemand » (eh oui, une fois de plus !).
Je me pose quand même des questions.

— Pépé qui fait dix mille kilomètres par an, il va les rentabiliser, ses gommes ?
— Mais oui ! Tout le monde va les rentabiliser. N'oubliez pas que quand vous roulez avec un train de pneus, vous n'usez pas l'autre.
— Et mon voisin ? Quand il neige, il prend le train pour aller bosser. Si on l'oblige à acheter des gommes « hiver », il va fatalement les utiliser !
— Elles sont plus sûres !

Ce qui est sûr, c'est qu'il n'y aura pas de miracle, mais qu'il y aura toujours des bouchons. Il y en a déjà quand il fait bon. Un peu plus quand il pleut (en Belgique, il pleut souvent) ou quand il y a du brouillard. Beaucoup plus en cas de grève dans les transports en commun (en Belgique, il y a souvent grève dans les transports en commun). Et plus encore en cas de neige ou de verglas.
Ceux qui essaient de nous faire croire que changer obligatoirement de pneus résoudra le problème sont de doux rêveurs, des menteurs ou des escrocs. En Belgique, le réseau routier est saturé. Le problème est là et uniquement là.
On ne le résoudra pas avec un changement de pneus, de même qu'on ne résoudra pas les problèmes de banditisme en équipant tout le monde d'un gilet pare-balles !

Voilà. C'était mon coup de gueule. La prochaine fois, j'essaierai de raconter quelque chose de rigolo. À propos du gouvernement, par exemple.

Les miracles

Les miracles ont quelque chose de fascinant. Je ne parle pas de ceux de Jésus, bien sûr, prouvés, vérifiés, avérés ; ni de ceux que vous devrez avoir réalisés au cours de votre vie si vous voulez que vos descendants puissent introduire à votre sujet un dossier de demande en béatification auprès du Saint-Siège.
Je parle ici de ces différents miracles dont nous bassinent les médias. Sans les citer tous, je vous rappellerai d'abord le fameux « miracle américain ». Celui-là trouve essentiellement son origine à l'époque de la Seconde Guerre mondiale ; quand, volant au secours des nations européennes écrasées sous la botte nazie, les braves Yankees ont importé chez nous leur chewing-gum, leurs pruneaux (on en déterre encore maintenant) et leur libéralisme. Leur effort de guerre, motivé d'abord par la volonté d'empêcher le troisième Reich de s'étendre exagérément et ensuite par celle de ne pas abandonner l'intégralité de l'Europe de l'Est au bolchevisme, leur ayant permis de s'enrichir colossalement, ils sont devenus notre « modèle de société ».
Depuis lors, bien sûr, il y a eu la guerre froide, le bourbier vietnamien et, plus proche de nous, la busherie iraquienne (sans parler des aliments transgéniques) qui font que les étoiles d'outre-Atlantique ont quelque peu pâli ; et on ne parle donc plus de miracle. Du moins en ce qui les concerne.
Il y a eu le « miracle japonais ». Il faut savoir que le Japon, ruiné par la Seconde Guerre mondiale (encore ! mais c'était de leur faute) et par la puissance de feu américaine (toujours ! mais c'était pour sauver le monde libre), s'est interdit par un article de sa constitution de devenir une puissance militaire. Comme il fallait pas mal reconstruire dans le pays en ruine, les Américains sont venus avec leur pognon (la guerre les ayant colossalement enrichis) et leur technologie donner un coup de pouce salvateur à ceux qu'ils appelaient les « Japs ». De la main-d'oeuvre autant qu'on en voulait et pour pas cher, et la garantie de bénéficier en cas de nécessité des services d'un porte-avions ancré pas trop loin au large des côtes soviétiques.
Ne pouvant redevenir une puissance militaire, le Japon est donc devenu une puissance économique, bouffant presque toutes les grandes marques photo, hi-fi, télévision et électronique en général. Ne sachant que faire de leur pognon, les Japonais ont à leur tout investi dans certains pays voisins. Et les miracles ont fait tache d'huile vers la Corée du Sud...
Depuis, ça ne va plus aussi bien. Le yen est trop cher et la concurrence occidentale a parfaitement intégré les techniques de production comme le « toyotisme ». Les Américains, très à la pointe en procès à la con et en pollution de la planète, leur ont fait cracher des millions de dollars pour des défauts de fabrication graves ayant causé la mort de 0,00004 % des acheteurs de leurs voitures scandaleusement à la pointe de la technologie.
Le miracle, pour l'instant, il est chinois. Ah ! on nous en tartine, du « miracle chinois ». Mais quel miracle ? La croissance économique, pardi ! Parce que le miracle, il est là-dedans. Pas dans le statut social des braves travailleurs bossant quinze heures par jour pour un salaire de misère dans des conditions épouvantables et bénéficiant en tout et pour tout de deux droits essentiels : le droit de se taire et celui d'en abuser.
Voilà un miracle qu'il est beau ! Et pour se donner bonne conscience, « ils » ont décidé en haut lieu de décerner un prix Nobel à un pauvre gars croupissant dans une geôle chinoise. Ce qui leur permet de dire « c'est un miracle, mais... » (Quand même !) Et la pollution ? N'en parlons pas. De toute façon, quand l'irrémédiable se produira, tous ceux qui tiennent actuellement les leviers du pouvoir ne seront plus là pour comptabiliser les pertes.

En ces temps de crise, on n'emploie pas toujours le mot « miracle ». Parfois, on dit « modèle ». Mais les miracles économiques sont souvent des modèles qui donnent l'inspiration, à défaut de pouvoir affirmer ouvertement une volonté de les suivre.
Le dernier en date, c'est le « modèle allemand ». Ils sont revenus en grâce, les Teutons, depuis la débâcle de 1945 ; jusqu'à devenir les « locomotives de l'Europe ». Dame ! La crise économique de 2008 – causée par les milieux de la finance, les banques et les spéculateurs qui font rien qu'à nous emmerder en jouant avec notre pognon – a lourdement sévi en Europe ; et qui s'en sort le mieux ? Les Allemands ! Voilà donc le modèle à suivre : modération salariale et coups de pied au cul. Comment diable n'y avons-nous pas songé plus tôt ? Il suffit de travailler plus et de gagner moins (les ouvriers, je veux dire), comme ça les patrons pourront gagner plus réinvestir dans un outil de travail plus performant et planquer leur fric aux Seychelles lutter à armes moins inégales avec ces miraculés de Chinois !
En réalité, les vrais responsables de la crise, ceux qui empêchent la reprise économique, ceux qui poussent au chômage et vident les caisses de l'État, ce sont ces couillons de syndicalistes, ces paresseux en congé de maladie, ces parasites faisant la manche dans les rues, ces réfugiés économiques voleurs et malhonnêtes, ces romanichels dont on demande bien de quoi ils vivent ; et surtout ces ouvriers pourris qui refusent de travailler plus pour gagner moins et s'accrochent obstinément à leurs quatre semaines de congés payés. Il leur faudrait une bonne guerre, tiens ! Juste pour leur apprendre. Ou alors leur faire faire un stage en Chine.
Parce que c'est ça, la vraie solidarité. Chacun doit y mettre du sien.


mardi 7 décembre 2010

Un train, des rails


C’était pendant la guerre…
Non, pas vraiment pendant la guerre, mais par moments, on se pose des questions…
Ceci se passe pendant la mauvaise saison, celle qu’en Belgique nous appelons l’hiver, mais qui produit parfois ses effets avant le 21 décembre et après le 21 mars ; et qu’il faut éviter de confondre avec l’automne, qui dure habituellement sept mois et demi.
Donc, ça se passe en hiver. Il fait froid, venteux, avec partout de la fine neige qui s’infiltre sous les vieilles portes, déboule dans les cours, s’accroche dans les jardins et forme des congères sur nos routes. Une distribution de sucre en poudre qui alourdit les arbres, remplit les caniveaux et ravit les enfants et les photographes. Vicieusement, cette substance ne manque pas de ramper au creux des aiguillages de la « jonction Nord-Midi », ce haut lieu de la circulation ferroviaire, ce nœud stratégique cher aux navetteurs.
Ce matin-là, après avoir bravement arraché quelques stalactites, les rares trains se dirigeant depuis le sud vers la capitale sont « limités à Bruxelles-Midi ». Et comment doivent-ils donc s’y prendre, les voyageurs à destination de la gare Centrale, pour arriver à bon quai ?
Si la Nature, dans son immense bonté, a pourvu l’être humain de deux jambes, c’est pour qu’il s’en serve. Parce que, sauf accident, nous sommes supposés capables de marcher depuis l’âge précoce où nos guibolles nous portent jusqu’à l’âge avancé où elles ne sont plus à même de le faire. Je sais que, bien souvent, les doutes nous assaillent : habiter en face d’une école ou se rendre au supermarché permet de constater que les grillages et autres portes vitrées semblent avoir acquis pour fonction première d’empêcher les voitures de débouler dans la cour de récréation ou de se faufiler entre les rayonnages.
Un navetteur empruntant les transports en commun pour se rendre à son travail n’a donc d’autre ressource que de se servir de ses jambes lorsqu’une voix annonce dans les haut-parleurs que son train n’ira pas jusqu’où il devrait. Et comme de Bruxelles-Midi à Bruxelles-Central, ce n’est pas très loin, autant le faire le long des rails. C’est interdit, certes, mais puisqu’aucun train n’y roule pour cause de gel généralisé des appareils de voie, ce n’est pas si dangereux. Le chef de gare a beau jouer les sémaphores, hurler, siffler… rien n’y fait ! À lui seul, et même en se faisant assister par quelques collègues, comment arrêter le flot des téméraires courroucés ?
Ce jour-là, je ne fais pas partie des contrevenants : comme tous les jours, c’est à la gare du Midi que je descends. J’arrive au boulot en retard, mais sain et sauf et en bonne entente avec le règlement de la SNCB.

Le soir (je préfère passer sous silence mes occupations de la journée), c’est avec un peu d’appréhension que je retrouve les courants d’air de la gare du Midi. La pagaille étant indescriptible, je ne gâcherai pas mon temps à tenter de la décrire, mais sachez que si nous avions été en période de guerre et soumis au rationnement avec la promesse d’une distribution imminente de pain quelque part dans la salle des pas perdus, les gens n’auraient pas eu l’air beaucoup plus hagard que ce soir-là.
J’ignore combien nous sommes à nous bousculer nerveusement devant les grilles d’horaires, à plisser les yeux pour lire ce qui s’affiche par-ci par-là lorsque les lettres et les chiffres défilent en cliquetant sur les afficheurs électriques ; ou à tendre l’oreille pour essayer de comprendre, dans le brouhaha ambiant, ce qui se raconte de temps à autre par le truchement des haut-parleurs. À plusieurs reprises, j’ai envie de crier : « vos gueules, nom de Dieu ! » Mais je m’en abstiens. Je suis encore bien éduqué.
Un train est annoncé. Plusieurs, même, mais si peu en rapport de ce qui est normalement attendu. En service intérieur, plus question de trajets directs. Les quelques rames qu'on annonce feront arrêt partout. Dans toutes les gares et sans doute aussi entre elles, au hasard des problèmes techniques.
En compagnie de centaines de voyageurs à l'air renfrogné, je joue des coudes dans les escaliers et parviens sur le quai déjà noir de monde en même temps qu'une série de voitures d'un modèle ancien, récupérées je ne sais où et immédiatement prises d'assaut bien qu'elles soient déjà bondées. J'ai omis de préciser que la « jonction Nord-Midi » a été partiellement remise en service pendant la journée, et que le train vient de la gare du Nord.
Les trois quarts des gens présents sur le quai ne parviendront pas à embarquer. Quelques téméraires tentent même de « faire le tour » par les voies, pendant qu'un petit groupe essaie d'ouvrir la porte du fourgon. Oui, le dernier tiers de la dernière voiture est constitué d'un fourgon fermé par une grande porte coulissante. Malgré les interdictions lancées par le chef de train, deux énergumènes munis d'une barre de fer (!) font sauter la serrure et glisser la porte. Aussitôt, c'est la ruée : plusieurs dizaines de masochistes s'en vont s'entasser dans le fourgon et refusent d'en descendre. L'opération « Nuit et brouillard » est déjà loin dans les mémoires.
Écoeuré, je quitte le quai sans regarder partir le train. Un autre est annoncé dans dix minutes. Le temps d'aller boire un café.
J'embarque finalement dans la troisième rame qui se présente, une heure environ après mon arrivée dans la salle des pas perdus. Elle fera arrêt dans toutes les gares, histoire de transformer mon trajet normal de trente-cinq minutes en un long voyage au coeur de la nuit. Bah ! Je n'en suis plus à ce détail près !
Les pressés, les excités, les inciviques et les égoïstes sont déjà partis en grognant, entassés dans les autres trains. Nous sommes encore nombreux, certes, mais plus calmes, résignés, cyniques même. Il en est qui plaisantent. Il vaut mieux en rire, tout compte fait.
Je trouve une place pour m'asseoir, car la rame est longue, très longue, constituée d'automotrices accouplées. Le problème est que de nombreuses petites gares se trouvant sur le trajet et devant être desservies ont des quais courts, très courts.
Le train fera donc deux arrêts dans ces stations. Oui, deux. Un demi-train à la fois.
Cette charmante journée a eu lieu voilà plus de vingt ans déjà, mais à quelques détails près, elle pourrait encore se répéter aujourd'hui.
Il suffit d'un peu trop de neige un peu trop fine avec un peu trop de vent.
La Nature a toujours le dernier mot.

jeudi 2 décembre 2010

La rue en pente


À moins de n'avoir jamais quitté la morne plaine, nous connaissons tous au moins une rue en pente. Le genre de rue qu'on aborde prudemment, quel que soit notre moyen de déplacement, et plus prudemment encore lorsque les conditions sont difficiles. Une voie plus ou moins carrossable le long de laquelle – eh oui ! – ont été érigées des maisons dont on se demande si les occupants souffrent ou non d'un mal de mer chronique. Un chemin où l'on n'abandonne sa voiture qu'après avoir vérifié, plutôt deux fois qu'une, que le frein de stationnement a bien été actionné et qu'on n'a pas oublié d'orienter vers le trottoir les roues directrices. Parce que tout le monde ne promène pas une brique dans son coffre ; et puis parce que les briques, utilisées comme ça, ça finit toujours bien par être sale à manipuler.
Une rue comme ça, tout le monde n'y circule pas de gaieté de coeur. Même les gamins n'y descendent plus en roller : maman ne veut pas, c'est trop dangereux à cause des autos. Une rue comme ça, on l'évite.
Mais il arrive parfois, et même souvent, que la pauvre voie en pente constitue un intéressant raccourci ou, plus prosaïquement, un « itinéraire bis » permettant de contourner les boulevards trop fréquentés et, aux heures de pointe, irrémédiablement embouteillés.
Eh ben moi, j'en connais au moins une comme ça. Quand je prends ma bagnole pour aller bosser, je ne manque jamais de me souvenir de son existence et des cinq à dix minutes de trajet qu'elle me fait gagner. À l'aller, ça descend. Le soir, au retour, ça monte.
Quand les conditions sont mauvaises, comme ces derniers jours, avec de la neige qui s'accroche, on se pose la question : j'y vais ou j'y vais pas ? La plupart n'y vont pas. Parce que c'est spécial. En montant, par exemple, il vaut mieux éviter de s'arrêter sous peine de devoir redescendre en marche arrière (si un autre optimiste vous a suivi, je vous laisse imaginer les noms d'oiseaux dont il va vous gratifier !). En descendant, il vaut mieux ne pas avoir à s'arrêter. D'ailleurs, on ne peut pas s'arrêter : c'est en première et au frein moteur. Les freins, ça ne sert à rien. Si : à bien vérifier que la voiture dispose d'un ABS et qu'il n'est d'aucun secours dans de telles conditions.
Alors, on fait comme au toboggan : on essaie de rester à distance respectueuse de celui qui s'y est aventuré juste avant nous.
Parfois, il y a un problème. Comme ce mardi.
Je descendais, peinard, pas franc mais pas trop angoissé non plus, à distance convenable de l'optimiste qui me précédait. Tout allait bien. Et puis, dans l'autre sens, quelqu'un montait. Enfin, essayait. La voiture s'était arrêtée et, dans de grands cirages de pneus avant, partait en travers de la voie malaisément carrossable.
« Hé ! Oh ! Pas ça ! Et par où je passe, moi ? »
Parce que je rappelle que s'arrêter en descendant quand il y a de la neige, c'est aussi optimiste que bouffer des huîtres au resto en espérant y trouver la perle pour régler l'addition !
J'essaie les freins : rien. Si. L'ABS qui me rappelle en me secouant la semelle qu'il ne me servira à rien.
Voyant qu'il n'y a pas la place, je serre à droite où, miracle, aucune voiture n'est en stationnement sur les lieux du drame qui se prépare. Caniveau, petit coup de volant... et hop ! Je m'arrête en jouant avec la bordure. Brave bordure !
De l'autre côté, le conducteur s'acharne. La voiture avance de deux mètres, recule d'un, récupère une partie de son travers. Coup d'oeil au rétroviseur : un optimiste qui s'est engagé après moi s'approche dangereusement. Il a sûrement l'ABS lui aussi. Tout le monde a l'ABS.
Tant pis ! Un trou et on y va ! D'un léger coup de volant, je décolle du bord du trottoir, sors la roue du caniveau et me faufile à vingt centimètres de l'autre, calé dans la côte. La conductrice me jette un regard désespéré.
« Non, désolé, Madame, je ne peux rien pour vous. On m'appelle plus loin. »
En passant, je croise un second automobiliste et découvre ses grimaces exaspérées. Il a un quatre-quatre. Il ne pourrait pas pousser l'auto de la madame ?
Je ne m'attarde pas sur la question et, un kilomètre et dix minutes plus tard, j'arrive sain et sauf au boulot. Ouf ! Pas aujourd'hui qu'on froisse de la tôle !
J'ignore si la dame s'en est sortie. Tout ce que je sais, c'est qu'en rentrant, le soir, j'ai soigneusement évité la fameuse rue en pente qui est un si bon raccourci.
Faut pas trop tenter le diable !


mardi 23 novembre 2010

Les tans sonts dure

C’est la crise, mon bon monsieur ! Alors on s’débrouille comme on peut !
Naguère, le ferrailleur passait dans la rue avec sa camionnette — genre tas de ferraille — et le haut-parleur vissé de guingois sur la cabine du véhicule nasillait : « Allô allô les ménagééééres ! Profitey de mon passâââch’ ! J’achète vieux zinc, vieux cuîîf, vieux plomb, viéyes batt’rîyes, viéyes machines à lââver et les viéééyes cuisinièèères ! »
Bref, toutes les vieilleries étaient les bienvenues, sauf la belle-mère parce que c’est trop dur à revendre.
De nos jours, la chanson est toujours là ; et si la musique n’a guère évolué, les paroles se sont vu apporter quelques nuances : « Allô allo les ménagééééres ! Profitey de mon passâââch’ ! Je vous débarrasse de vos vieux zinc, vieux cuîîf, vieux plomb, viéyes batt’rîyes, viéyes machines à lââver et les viéééyes cuisinièèères ! » Ce n’est que la base, parce que maintenant on y ajoute les vieux câbles électriques (à ne pas confondre avec les nouveaux que des malhonnêtes sans haut-parleur chouravent à notre pauvre société des chemins de fer), les vieux frigos, congélateurs et quantité de vieilleries que vous n’oseriez imaginer (mais toujours pas la belle-mère).
Je ne sais pas si vous avez remarqué la subtile nuance, dans le texte : le « j’achète » s’est mué en « je vous débarrasse de ». Eh oui ! Les temps sont durs, madame ! Ils n’achètent plus. Ce qui ne les empêche pas de revendre, malgré tout.
Vous aurez certainement noté que comme les rigolos passent en général au moment où bébé fait sa sieste, ça n’a pas tendance à mettre la jeune maman de bonne humeur. Moi non plus. Alors plutôt que de les héler quand ils passent et de leur donner deux ou trois bricoles (ce qui leur permet en passant d’inventorier en connaisseurs le contenu de mon garage et de me signaler qu’ils prennent aussi les vieux vélos — « Mon vélo ? Et pourquoi pas ma belle-mère, hein ? » — Non, je rigole. Je range pas ma belle-mère dans le garage) ; je préfère aller les déposer moi-même à la déchetterie. Je sais, c’est mesquin. Mais je suis mesquin (en plus d’être démodé).
Les temps sont durs pour tout le monde, en fait. Pas pour Bill Gates et quelques happy few, naturellement, mais on ne va pas s’embêter avec les exceptions.
Dans le genre « je vent, j’achaite touts », la période de crise a glissé en juin dernier dans ma boîte aux lettres l’intéressante proposition ci-après.



C’est vrai que quand on a (un peu) séché l’école, on éprouve généralement des difficultés dans la maîtrise de la langue française. Espérons que notre acheteur a pu digérer les opérations de base et le système métrique. Sans ça, c’est mal barré.



mardi 16 novembre 2010

Histoire d'eau

Dans la foulée de mes commentaires d'hier quant à la météo du week-end, je me suis demandé si les autorités ayant installé la signalisation ci-dessous avaient été sujets à un rêve prémonitoire.
J'ai photographié ce panneau dans une rue en pente conduisant à un canal. Il doit sous-entendre : "préparez vos freins".
On aurait pu planter un tel panneau à l'entrée de certaines écoles du pays, ce lundi 15/11 au matin.

lundi 15 novembre 2010

Fichu week-end !

D'accord : il n'aura plu qu'une seule fois. Mais pendant quarante-huit heures, quand même ! J'ai vu les images à la télé, et c'est à ces moment-là qu'on est content de ne pas avoir élu domicile au fond d'une vallée. Ou alors il faut le faire sur une péniche, ou quelque chose comme ça.
Pour une fois, je ne vais pas me lamenter. Pas d'eau dans la cave, pas d'eau dans le garage, pas d'eau dans le living. Juste dans la cuisine et la salle de bains, mais là c'est normal. Y a qu'à ouvrir les robinets.
Non, je ne vais pas me lamenter. Certains n'ont pas eu de chance, chez nous en Belgique. Dans d'autres pays, à d'autres moments, ce fut pire encore. Ici, nous sommes bien équipés, correctement secourus, à peu près correctement assurés et maladroitement gouvernés. On a les dirigeants qu'on mérite : c'est ça la démocratie et le suffrage universel.
Ailleurs, parfois, il fait sec. Très sec. Trop. Madame fait dix kilomètres à pied pour la corvée d'eau en espérant une petite averse qui fera pousser les légumes dans le potager.
Le monde est mal foutu. Nous on a l'eau, eux ils ont la soif.
Ce matin, les gens m'ont regardé bizarrement alors que je vidais des seaux de dix litres dans l'avaloir, devant chez moi. L'air de dire : "Tiens, il a été inondé, lui ? Il écope ?".
Rien de tout ça. Faut bien virer quelques dizaines de litres de l'aquarium à cichlidés, de temps en temps, pour en remettre de la propre et fraîche. C'est aussi une sorte de corvée-eau. Chérie ne veut pas que je vide les seaux dans l'évier de la cuisine ; donc le plus proche c'est l'avaloir ou le caniveau.
J'ai eu du bol. Ce matin il ne pleuvait plus.

mardi 9 novembre 2010

Les meuilles fortes se rapassent à la melle


Le train se rend de gare en gare mais la gare demeure et ne se rend pas.
Il faut cependant reconnaître que parfois, le train ne se rend pas non plus. Les causes en sont diverses : grève impromptue, bris de caténaire, panne de machine, déraillement d’un convoi de marchandises, gel d’aiguillages, chutes de neige et, tout récemment, envahissement de feuilles mortes.
Les Chemins de fer belges nous rappellent à la dure réalité de la vie, nous qui rêvions encore de plages ensoleillées et de balades en montagne : c’est l’automne, la Toussaint, les cimetières, les fleurs, les commémorations, les saluts au drapeau et les gerbes à la tombe du Soldat inconnu.
Nos feuillus se joignent donc à la fête et, pour qu’on les remarque, expédient leurs défunts là où il ne faut pas pour empêcher les trains d’avancer et les enquiquiner à l’instant du freinage. Sournois, vicieux et surtout imprévisible, l’automne est bien là avec son lot de contrariétés. Damned ! Encore un truc qui nous tombe dessus comme ça, sans crier gare. Et je ne raille pas.
C’est pourtant joli, l’automne. Des couleurs, des odeurs, des tapis moelleux qui crissent ou qui glissent selon les conditions atmosphériques… De quoi nous rappeler que si la nature nous a pourvus de deux jambes, c’est pour nous en servir : une petite laine ou un ciré, des baskets ou une paire de bottes, et surtout ne pas oublier d’emporter la boîte à souvenirs.
Et au retour, s’asseoir devant un bol de soupe, un chocolat chaud, un café ou une bière d’abbaye ; la tête remplie d’images et le cœur léger.

dimanche 7 novembre 2010

La lessive

— Tu me donneras tes vêtements, que je les lave ?
— Lesquels, Chérie ?
— Ceux-là.
— Heu... Je suis dedans, tu sais.
— Ben oui, mais je fais justement une machine avec des couleurs.
— Bon.
— Hé ! Mais qu'est-ce que tu fais ?
— Ben, je te donne mes vêtements.
— Tu vas pas te déshabiller ici, quand même !
— J'suis chez moi, non ?
— Mais... on va te voir.
— Où ça ?
— Par la fenêtre, là.
— Mais non ! Tiens, le jean...
— Mais je voulais pas tout de suite !
— Et le sweat-shirt. Voilà.
— Mais t'es dingue ! Arrête !
— Grrrmllmmm...
— Non ! Pas le slip ! Je lave pas des slips maintenant et... Ah ! Mais arrête ! T'es dingue ou quoi ? On va nous voir !
— Mais non !

(suite impubliable)


vendredi 5 novembre 2010

Passage à l'heure d'hiver


Comme ce n’est pas la première fois qu’on procède à ce changement, j’aurais pu écrire « le repassage à l’heure d’hiver », mais ça fait tâche ménagère à la lueur avare d’une journée d’automne maussade.
Ce n’est pas pour râler, mais ces changements d’heure, moi, ça m’agace.
Comprenons-nous bien : je n’avais rien contre cette heure d’été qu’on vient de méchamment abandonner ; et je n’ai rien non plus contre l’heure d’hiver que nous venons d’adopter. À part l’hiver en lui-même, peut-être, parce qu’ici en Belgique l’hiver est plus souvent synonyme de grisaille et de gadoue que de sports de glisse en pleine nature enneigée.

Ce qui m’agace, c’est ce changement, deux fois par an. Avancer d’une heure au printemps, reculer d’une heure en automne. J'ignore de combien d’horloges vous disposez, chez vous, mais en ce qui me concerne, c’est un paquet ! Et, à l’exception de celles de nos ordinateurs, aucune ne prend l’initiative de procéder d’elle-même à ce foutu changement.

Combien de montres, déjà ? De radios-réveils ? D’horloges ?
Dans la cuisine, il y en a déjà trois : le micro-ondes, le four et la grande accrochée au mur (grimper — dépendre — régler — rependre — descendre). Le magnétoscope et le lecteur/graveur de disques digitaux ne sont pas en reste. Mon téléphone portable ne change pas l’heure tout seul. Certains le font peut-être, mais pas le mien (je suis démodé, je l’ai déjà signalé). Ni celui de Chérie.

Dans la voiture, vous avez une horloge ? Moi aussi. Vous vous fichez qu’elle soit à l’heure ? Moi non plus.

Je croyais en avoir terminé avec tout ça, mais le soir qui a suivi cette délicieuse matinée, l’éclairage de l’aquarium s’est éteint une heure trop tôt, rapidement imité par le thermostat d’ambiance du chauffage central, pressé d’adopter le programme de nuit.
Entretemps, le chat (je vous ai déjà parlé de ce feignant), habituellement en avance d’une heure sur l’horaire le plus optimiste pour réclamer sa gamelle, avait quitté son coussin cent vingt bonnes minutes trop tôt dans un récital de miaulements, ronrons et frottis-frottas racoleurs.

Connaissant la loi de la frustration universelle, j’hésitais à me dire : « ouf ! fini jusqu’au printemps ! ». Une intuition ? Moins de vingt-quatre heures après que j’eus procédé à tous ces changements, notre fournisseur d’électricité interrompit le service dans tout le quartier pendant cinq heures « pour des raisons techniques indépendantes de sa volonté ».
Je sais : en cas de coupure de courant, certains appareils ont une réserve de fonctionnement de quelques centièmes de secondes (presque tous), d’une poignée de minutes (pas vraiment grosse, la poignée), voire de plusieurs heures (là, c’est très rare) et même de plusieurs jours (à condition d’avoir songé à remplacer la pile avant qu’elle soit épuisée !). Les miens appartiennent soit à la première catégorie, soit à la dernière, ce qui finalement revient au même parce que ces fichues piles s’usent toutes seules sans préavis.

Foutus changements d’heure !

mercredi 3 novembre 2010

Je suis démodé

C'est triste à dire, mais je suis démodé.
J'étais démodé.
Je n'avais pas encore créé de blog, je n'avais pas encore raconté ma vie sur la toile, je n'avais pas davantage mis de photos de moi, de Chérie, de la maison, du jardin et de cet animal paresseux et racoleur appelé "le chat". Je n'avais pas relaté mes voyages, étalé mes rêves et mes fantasmes et mon voeu pieux d'enfin remporter le pactole à la loterie. Cent pour cent des gagnants ont tenté leur chance, paraît-il. Moi aussi.
C'est pour ça que je continue d'aller bosser.

Je vais rester démodé pour quelque temps encore, même si j'ai mis mon blog en route.
Je ne raconterai pas ma vie - pas toute, du moins - et je ne posterai pas de photos de Chérie, de la maison, du jardin et du feignant ronronneur.

Vous verrez quelques photos de voyages, oui, mais pas de voyages de rêve dans des régions de rêve. Juste quelques images de mon petit pays coincé entre la mer du Nord, deux puissants voisins, un paradis fiscal (comparé au mien) et un platte land peuplé de campeurs voyageurs.

Vous pourrez également y lire quelques récits de fiction, des histoires à rire et à rêver, l'aventure en toutes lettres, celle qui n'a d'autres limites que celles de nos écrans, de notre imaginaire et de nos envies d'évasion.

Ce sera pour bientôt.
Quand je serai un peu moins démodé.


Ludovic