samedi 30 juillet 2011

Départ en vacances


Nous roulions joyeux sur la route des vacances.
Dans notre grande sagesse (la mienne, surtout), Chérie et moi avions tout prévu, sage précaution quand on souhaite éviter l'imprévu.

Nous avions nos chèques-voyage, notre carte d'assistance, nos réservations ; nos congés nous avaient été accordés (de haute lutte avec une collègue pisse-vinaigre qui arguait qu'elle a deux mouflets lui donnant la priorité).
Les listes d'objets à emporter avaient été dressées, vérifiées, approuvées ; l'itinéraire était prêt et nous avions acheté ce qui nous manquait encore.

Tout était emballé, étiqueté, enfermé dans la malle de la voiture.
Nickel.

Nous roulions joyeux lorsque...

T'es sûr qu'on n'a rien oublié ?

C'est bien les femmes, ça ! « T'es sûr qu'on n'a rien oublié » !
Parce que moi, si j'oublie quelque chose, c'est pas volontairement, en général. Donc comment voulez-vous que je dise si j'ai oublié quelque chose ? Bon, oui, c'est possible, mais quoi ? Puisque c'est oublié...

Beuh... En principe, on a tout. Y avait les listes, et on a coché au fur et à mesure.

Parce que d'ordinaire, je suis plutôt bien organisé : le pense-bête est préparé de longue date, avec des cases à cocher pour ce qu'il faut acheter, puis emballer, puis mettre dans la bagnole.

T'es sûr qu'on a bien fermé derrière ?
Le coffre de la voiture ?
Non, la maison.
Ben... C'est toi qui as fermé, non ?
Ah, non. C'est toi. Tu te souviens pas ? C'est pour ça que je te le demande.
Je dois avoir fermé. J'ai fermé, certainement.
C'est quand tu as dit que tu allais vérifier si on avait fermé la bonbonne de gaz.
Oui, ben alors, j'ai fermé.
N'empêche que ça me tracasse, et... Attention ! Freine !
Sacrebleu ! Quelle andouille, ce Hollandais ! Eux et leurs caravanes...
Tu l'avais pas vu ?
Forcément ! Tu me tracasses avec tes questions...
Oh ! Ça va !
Maman...
On roule, y a du monde, alors faut pas me distraire.
Oh lala...
Mamaaaan...
Hhuuuuh ?
C'est la petite.
Mamaaaan, j'suis malaaaade...
Oh, non ! Chérie, fais quelque chose...
J'dois vomiiiir...
Oh, pas ça !
Arrête-toi, bon sang ! T'entends pas que la petite est malade ?
Mais si, j'entends ! Mais je peux pas arrêter comme ça !
Mets-toi sur le côté ! Mets tes feux de détresse.
Mamaaaaaann...
Oui, oui, on s'arrête, mon petit cœur. On va s'arrêter... Arrête-toi, bon sang !
Mais oui-euh ! Je m'arrê-teuh !
Mamm.... Bleeeeuuuuââââârrk !
Et meeeerde !
Trop tard ! M'enfin ! Pourquoi tu t'arrêtes aussi brusquement, hein ?
Oh ! Ça va !

Nous voilà donc sur le bord de la route.
Comme on a tout prévu, on a toujours un gros bidon de flotte dans le coffre, avec des chiffons et du papier-cul. Pendant que Chérie s'occupe de la gamine, je retrousse mes manches et vide la moitié de la malle arrière. Parce que le matériel de nettoyage est rangé derrière une trappe latérale inaccessible quand le coffre est bourré jusqu'à la gueule.

Pendant que j'éponge, que je frotte, que je rince et que j'essuie en maîtrisant mes nausées, Chérie achève de sortir les bagages pour choisir dans la-grosse-valise-qui-est-tout-dans-le-fond des vêtements de rechange pour la petite.

On remballe, on range. Après tous ces travaux, j'ai soif. Où est la glacière ?

Elle est là.
Zut ! On allait l'oublier.
Heureusement qu'on l'a vue.
Et... et je la mets où ? Y a plus de place.
Forcément. On a été trop vite pour tout remettre en place.
Ne parle pas de remettre, s'il te plaît.

On s'organise. On déplace des sacs, des paquets, des valises.

T'en as pris, des vêtements !
Juste ce qu'il faut.
Bah ! J'suis sûr. On va être en maillot toute la journée, et t'as pris des lainages.
On ne sait jamais.

Finalement, on repart... mais pour quelques mètres seulement.

Qu'est-ce qui se passe ? T'as oublié quelque chose ?
Non. On a un problème. T'as pas senti ?
Je sens que... mais on n'y peut rien, hein ! Ouvre un peu ta fenêtre.
Je parle pas de ça. J'espère qu'on n'a pas crevé.

Hélas ! C'est la triste réalité. En nous rangeant sur le bas-côté, on a dû rouler sur quelque chose de néfaste pour l'avant-droit qui en est tout raplapla.

Heureusement qu'on a une roue de secours et qu'elle est bien gonflée, hein !

Oui, parce que je rappelle qu'on a tout prévu. Même ça.
Ce qui n'empêche que ladite roue de secours, le cric, la manivelle et la clé en croix sont bien planqués sous le plancher du coffre. En soupirant et en maudissant les concepteurs de la voiture, nous déchargeons une nouvelle fois les bagages.

Trente minutes d'effort et de sueur avant de vider cul sec un litre d'eau de source, et nous repartons. Pour de bon, cette fois.

Pas de panique. Nous avons déjà parcouru deux cents bornes, soit un cinquième du trajet, que peut-il encore nous arriver ? Une sortie de route ? Un attentat ? Un tremblement de terre ? Céline Dion à la radio ?
En conduisant, j'essaie de ne pas penser à toutes les mésaventures qui pourraient survenir.

Soudain, c'est bizarre, voilà que la bagnole n'avance presque plus. Pourtant, elle est bien entretenue. Comme j'ai tout prévu, je suis passé au garage la veille du départ, et tout a été vérifié.
Mais voilà. Ça n'avance plus. Tout le monde nous dépasse.

Que se passe-t-il encore ?
Je sais pas. On n'avance pas. Et je pousse à fond sur la pédale, pourtant.

C'est vrai. Je m'arc-boute de toutes mes forces, en danseuse, les mains crispées sur le guidon. Je souffre... je sue... mais heureusement, j'arrive en haut de la côte. Ça va être plus facile. Après, ça descend.

Peu à peu, mes foulées s'allongent, je cours plus vite, je respire mieux. J'entends même le bulletin météo. On annonce de la pluie. C'est bien ma veine !

Machinalement, j'étends le bras pour faire taire ce stupide radio-réveil.
J'ouvre les yeux. Il fait sombre. Le ciel doit être gris. Il ne me reste plus qu'à m'arracher au confort du lit pour une nouvelle journée de boulot. La dernière.

On part en vacances demain.

Dors, Chérie. Tout va bien.

mardi 26 juillet 2011

Le café des sports


On trouve des trucs marrants, sur Internet. « Le café des sports », sur le site de  « L'équipe » , par exemple.
Il y a là des gens qui postent des messages au sujet du Tour de France cycliste. On y discute tactique, on y risque des pronostics, on y lance des accusations sans fondement…
J’y ai relevé quelques interventions qui m’ont bien fait rire.

Celle-ci, par exemple (mais que son auteur ne m'en veuille pas, il y en a des tas plus ou moins comme ça) :

Texto : « quand je pense que Vockler aurait pu etre sur le podium sans l' incompetence de son directeur sportif qui lui a dit de continuer dans l' etape de l Alpe d' huez si seulement il avait attendu que Evans revienne sur lui et monter ensemble et Thomas aurait eu encore de la ressource pour finir avec les favoris »


Après coup, Coco, c’est toujours facile à dire, des « il aurait dû faire ceci » et des « il n’aurait pas dû faire cela ».
Moi, la tactique et la stratégie appliquées à des équipes de coureurs cyclistes professionnels, j’y connais peau de couille ; par contre je suis déjà monté sur un vélo et j’ai déjà pédalé à fond la caisse, alors je peux te dire que c’est dur, comme sport. C’est violent.

J’ai déjà grimpé des côtes avec un autre gars qui pédalait en ma compagnie, et souvent j’ai essayé d’aller plus vite que lui, et lui plus vite que moi. Mais je pouvais pas. Et lui non plus. Et même si le soir, après coup, je me disais que j’aurais quand même dû essayer de pousser un peu plus sur les pédales, ça changeait rien au fait que, sur le moment, je pouvais pas. Et lui non plus.
Et t’en fais pas : s’il avait pas été en grande forme, je l’aurais vite remarqué et je lui aurais collé une minute ou deux. Mais je pouvais pas. C’est simple, non ?


Autre chose...

Texto : « un opportuniste qui n'a fait qu'attendre les défaillances de ses adversaires. »

« Voeckler peut dire merci a Evans qui à emmener tous le monde »

« il a fait de la patinette pendant toute la montée »


Ah ouais. « Rester dans les roues pour monter sans se fatiguer ». Un grand classique.
Alors moi, la tactique et la stratégie appliquées à des équipes de coureurs cyclistes professionnels, j’y entrave que dalle ; par contre je suis allé un petit peu à l’école et j’y ai appris quelques petites choses qui m’ont aidé à comprendre pourquoi c’est dur, le vélo.

Pour faire simple, Coco, laisse-moi te dire que pour avancer sur ta bicyclette, tu dois vaincre des forces naturelles qui font rien que te contrarier la plupart du temps. Les deux forces principales sont la gravité et la résistance de l’air (il y en a d’autres, comme les frottements mécaniques des pièces mobiles du vélo et ceux des pneus sur la route, mais c’est plutôt secondaire).

La gravité, c’est l’attraction terrestre. La Terre, elle aime tellement ses habitants, même les plus cons d’entre les plus cons, qu’elle les attire à elle du matin au soir et du soir au matin. Elle veut pas qu’ils s’éloignent.

La gravité, c’est donc une force qui s’exerce verticalement de haut en bas sur le cycliste et sa machine. C’est cette force qui, en terrain plat, voudra te faire rester sur place. Sur une pente, elle va t’attirer dans le sens de la descente. Quand tu perds de l’altitude (descente), la Terre est contente, elle t’aide. La gravité ne t’oblige même pas à pédaler.

Quand tu gardes la même altitude (terrain plat), tu ne contraries pas trop la gravité. Tu gardes la même distance par rapport au centre de la Terre.

Par contre, si tu cherches à prendre de l’altitude (côte, col), la Terre, elle aime pas ça. Tu veux t’éloigner de son centre. La gravité s’y oppose farouchement. Donc, pour grimper, active tes guibolles. Et plus la pente est raide, plus tu contraries la gravité, donc plus c’est dur à monter.


Autre élément naturel à vaincre : la résistance de l'air.
La résistance de l’air, c’est vachement important aussi. Parce qu’un cycliste, ce n’est pas plus aérodynamique qu'un grille-pain. Quand il avance (le cycliste, pas le grille-pain), il doit se frayer un passage au travers de molécules d’air qui n’aiment justement pas qu’on les bouscule et qui font tout pour le contrarier. En progressant, le pédaleur et sa machine repoussent donc les molécules d’air, qui s’empressent de reprendre leur place quand ils sont passés. C’est comme si le cycliste, après avoir poussé l’air pour avancer, l’attirait ensuite derrière lui, créant ce qu’on appelle l’aspiration.

Et tu sais quoi, Coco ? Plus la vitesse de déplacement du cycliste augmente, plus ces phénomènes de résistance et d’aspiration prennent de l’importance.

Quand un peloton roule vite, ceux qui sont à l’avant doivent fendre l’air (c’est du boulot) alors que ceux qui sont dans les roues bénéficient de l’aspiration (c’est plus cool). Quand tu es au cœur d’un peloton qui roule à 50 km/h, tu te fatigues donc beaucoup moins que ceux qui sont à l’avant. Par contre, pour que le groupe maintienne cette vitesse élevée, il faut relayer les meneurs, leur laisser le temps de récupérer dans le peloton. Voilà pourquoi une poignée d’échappés ne peut pas, en plaine, rouler aussi vite qu’un peloton où vingt coureurs se relaient pour fendre l’air.


Enfin, il y a une autre force de frottement, liée à la résistance de l’air et qui joue parfois les trouble-fête, c’est le vent. Le vent, c’est de grandes masses d’air qui se déplacent. Si elles vont dans le même sens que toi, elles facilitent ta pénétration dans l’air. Dans le sens contraire, elles la rendent encore plus compliquée.

De tout cela, tu peux déduire que tu avanceras plus facilement en descente avec le vent dans le dos qu’en montée avec le vent de face.

Tu peux également comprendre que sur le plat et à grande vitesse, le plus dur à vaincre, c’est la résistance de l’air ; tandis qu’en côte et à faible allure, l’ennemi numéro un, c’est la gravité.


On en revient maintenant à l’expression « rester dans les roues ».

Sur le plat ou en léger faux plat, quand un groupe roule vite, l’aspiration joue son rôle et c’est l’homme de tête qui se fatigue le plus.
Mais dans l’ascension d’un col, où on roule lentement, l’aspiration est ridiculement faible. Celui qui reste dans les roues doit pédaler aussi fort que celui qui ouvre la route. La preuve en est que dans un col, ça lâche « par l’arrière » beaucoup plus facilement qu’en plaine.

Quand il y a un vent défavorable, toutefois, on peut s’abriter un peu en restant « dans les roues », mais les routes des cols étant rarement rectilignes et même souvent en lacets, le sens relatif du vent s’en trouve fréquemment modifié. Chacun des concurrents va donc s’arranger pour s’en abriter le mieux possible, à la faveur des changements de direction. On remarque également qu’en cas de fort vent contraire, les attaques sont rares et la plupart du temps vouées à l’échec.

Dans l’ascension d’un col, ceux qui grimpent ensemble produisent à peu près le même effort. L’homme de tête adopte le rythme qui lui convient, et c’est bon pour lui tant que les autres n’ont pas envie d’aller plus vite. Celui qui est « dans la roue » ne profite pas de l’aspiration, l’allure étant trop faible. Il a par contre l’avantage d’être immédiatement renseigné sur son aptitude à suivre le premier ; alors que celui qui mène, tant qu’il ne lâche pas les autres, ne se rend pas facilement compte si l’allure qu’il imprime « leur fait mal ».

Donc, Coco, grimper le Galibier, en tête ou dans la roue, ça change pas beaucoup : c’est très dur. Eh oui !



Au café des sports, en plus des maîtres-tacticiens, il y a les supporters indéfectibles...

« L'année prochaine, Contador mettra de nouveau tout le monde d'accord. »


... et les adeptes de la méthode Coué :

« demain c'est frank qui passe à l'offensive au pied de l'alpe pour user evans et servir de rampe de lancement pour andy.Andy et thomas voeckler au sommet de l'alpe d'huez ensemble.Evans et contador 2 min derriere.Thomas en jaune a PARIS.Vous pouvez eteindre la télé jusqu'a Dimanche. »



Au café des sports, il y a aussi l’humour de beauf’. Ce qui revient le plus souvent, ce sont les sarcasmes à propos de Contador privé de son steak (accessoirement parce que Voeckler le lui a piqué). Un exemple, au hasard :

« contador retorne a la maison! sans steak tu n'est plus rien! »


Ah ! Le dopage...
À ce sujet, tu peux consulter cette page et celle-ci également.


Enfin, si les intervenants sont balèzes en tactique, ils le sont beaucoup moins dans d’autres domaines. Quelques exemples qui m'ont bien fait marrer…

« je crois que Andy à remis tout ses detraqueurs à leur place !! »

« un grand grand voeckler qui a defendu son mayo »

« Aller demain les Schleck font tous peté a l'Alpe d'huez ! »

« Il a certes profité de la faiblesse de l'adversité dans la poursuite »

« il aurait donc peut dû se sacrifier »

« Demain l'Alpe et samedi le contre la monte ! » (ça saute pas aux yeux, celle-là)

« Ceux qui ont été repéchés ne l'auraient pas du l'être »

« Que je chasse en contre la montre et en montagne , contador est encore tres superieur . »

« si TV avait des droits ,et que ROLLAND aurait etait pas là,je pense qu'Andy dit moi oui!!!!oh ouh oh ouh oh!!!aurait peutetre attendu son frere Frank,et que du coup Alberto il aurait revenu sur Rolland qui aurait du freiner pour attendre Thomas et tout le monde sait que c'est dangereux de freiner quand on est suivi pas Christian "Prudent".....alors merci ASO vive le tour bravo Mr Evans eta l'année prochaine avec une super equipe EUROPCAR?!?!?!... » (Gasp !)


 
Celle-ci, je l'aime bien :

« les étapes de montagne se résument à des courses de côtes »


Et la dernière, elle est superbe :

« Il y avait 5 europcar dans le groupe éteau »

Ha, ha, ha ! Alors que tout le monde sait bien qu'on écrit « étau » !


Je laisse néanmoins la conclusion à cet intervenant :

« C'est vraiment marrant de constater que ce forum porte très bien son nom : " Le Café des Sports"... »



lundi 18 juillet 2011

Actualités à la con


Dans un récent article, STONI parlait de l’envie d’écrire. Ceux pour qui l’écriture est un plaisir voire une passion ne souffrent jamais d’un manque de motivation ; mais l’inspiration, par contre, ne se commande pas et il leur arrive de « sécher » devant leur traitement de texte.

Le meilleur atout de l’administrateur d’un blog est d’être maître chez lui. Bien sûr, il vaut mieux rester dans les limites imposées par la bienséance et la légalité, mais en dehors des contraintes techniques posées par l’hébergeur dudit blog, la liberté est réelle.

J’aurais pu choisir un rythme de publication et m’y tenir, mais à quoi bon m’astreindre à publier une bafouille par jour, par semaine ou par mois ? Je n’ai aucune obligation de résultat, aucune échéance à respecter, rien à perdre ni à gagner. L’important est de faire vivre ce blog, de l’alimenter de temps à autre avec mes scribouillages et de remercier ceux qui, aimablement, me font le plaisir de laisser leurs commentaires.

En écrivant cela, j’ai une pensée émue pour les tâcherons du traitement de texte poursuivis par des échéances : auteurs sous contrat harcelés par leur éditeur, chroniqueurs tenus sous peine de licenciement de remettre leur prose à temps et à heure, journalistes suspendus à une actualité parfois en léthargie… Je me demande d’ailleurs si ces derniers ne sont pas le plus à plaindre.

Quand un auteur de fiction n’est finalement limité que par son imagination et son énergie à la retranscrire avec des mots, le journaliste et le commentateur sont parfois contraints de « meubler », quand il ne se passe rien. Ils ne peuvent pas, comme François Merlin (Jean-Paul Belmondo, dans « Le magnifique »), envoyer dans leurs histoires les personnages qui les ennuient, les stressent ou les font fantasmer, et prendre plaisir à les plonger dans des situations ridicules, embarrassantes, impossibles, inextricables.

En Belgique, l’actualité politique est devenue répétitive jusqu’à l’ennui, et les chroniqueurs ont bien du mérite à trouver encore quelque chose à écrire. Comme il leur est rarement permis de délirer, de se venger, de s’amuser en inventant les événements, je vais le faire pour eux.


# À Vilvoorde, des militants d’extrême droite ont tenté d’incendier un drapeau belge. La pluie ayant détrempé l’objet, les flamingants ont fini par l’asperger d’essence siphonnée au réservoir d’une voiture stationnée à proximité. Une patrouille de police qui passait par là en camionnette est intervenue au moment où l’un des manifestants battait le briquet. L’incendie du quartier est à présent sous contrôle ; les quatre policiers brûlés sont en clinique où leurs jours ne sont, fort heureusement, plus en danger ; les incendiaires sont sous les verrous ; la camionnette est en fuite et on reste sans nouvelles du drapeau.

# Un petit condor a vu le jour au zoo d’Anvers. Les gros cons de bronze en sont restés de marbre. On apprend d’autre part que quatre bébés lynx sont nés dans la réserve naturelle de Han-sur-Lesse. Des bêtes qui voient clair, ça nous changera des autres.

# Quatre cents jours se sont écoulés depuis que les Belges ont voté. Pour en finir avec la crise, le roi Albert II a proposé qu’un tirage au sort soit effectué parmi les bulletins de vote pour désigner les heureux gagnants des postes ministériels. Les présidents des partis politiques ayant refusé, le roi a déclaré : « Si vous ne trouvez pas un compromis pour qu'un gouvernement de plein exercice soit mis en place pour Noël 2012, j’abdique et vous vous débrouillez avec Philippe. » Contrairement à ce dernier, la menace est prise très au sérieux. Lequel des deux compromis obtiendra la préférence ?

# Comme chaque jour, nous nous attardons sur une personnalité du paysage politique belge. Aujourd’hui, Wouter Beke a accepté de répondre à nos questions. Nous le remercions très chaleureusement pour ses réponses sincères et constructives, dont vous trouverez la fidèle retranscription dans l’interview de Bart De Wever, publiée hier.

# Les dix mille Belges interrogés sur leurs intentions de vote, au cas où des élections seraient organisées avant la fin de l’année en cours, ont déclaré qu’ils n’avaient pas changé d’opinion et qu’ils voteraient de la même façon qu’en juin 2010. Voici les principales tendances qui se dégagent de ce sondage, côté francophone : PS (-0,3 %) ; MR (+0,2 %) ; Écolo (+0,1 %) ; CDH (-0,1 %). Côté néerlandophone, le statu quo est également très perceptible : NVA (+18,5 %) ; CD&V (-14,3 %) ; SPA (-1,8 %) ; OpenVLD (-0,4 %) ; VlaamsBelang (-2,7 %).
Les leaders politiques restent dès lors unanimes : de nouvelles élections ne changeraient rien à la situation actuelle.

# Les réunions ont repris au siège de l’Union belge de football pour établir le règlement du prochain championnat de première division. C’est une formule en matchs aller-retour à élimination directe qui a la cote, mais il reste à désigner les têtes de série, la marque du sifflet de l’arbitre de chaise et la longueur des plongeoirs.

# Soumises à des « stress tests », les banques s’en sont bien tirées. Même les banques belges qui n’ont plus grand-chose de belge à part notre pognon et leurs employés. Mais ce n’est pas non plus du stress de ces derniers dont il était question.


Et tant qu’on y est, pourquoi ne pas déborder carrément des frontières de notre petit pays ? L’actu internationale se prête au jeu…


# Les coureurs les mieux placés au classement général du Tour de France se sont exprimés, pendant cette journée de repos, quant à leurs chances de l’emporter. Thomas Voeckler, actuel maillot jaune, a estimé nulles les siennes. Les frères Schleck ont dit que Cadel Evans était en position de force. Interrogé à son tour, l’Australien a déclaré qu'il fallait se méfier de Contador. Et lorsqu’on lui a tendu le micro, l’Espagnol s’est borné à répéter qu’il n’était pas dopé. En conclusion, Laurent Jalabert a regretté de n’avoir pas pris le départ pour montrer à toutes ces lopettes comment on pédale sérieusement.
Certains soutiennent par ailleurs que la tribune de presse est hantée par un fantôme qui lance des vannes d’une voix éraillée et rigole entre deux quintes de toux.

# Certains prétendent qu’aujourd’hui, pour cent balles, on n’a plus rien. Ce n’est pas l’avis des soldats de l’armée syrienne.

# Un attentat a été déjoué en Iran, où quatre terroristes occidentaux ont été arrêtés en possession de plusieurs DVD des productions Marc Dorcel. Le porte-parole du gouvernement a rappelé que la lutte contre les cochonneries devait être un combat de tous les instants.

# Le « procès du siècle », opposant Silvio Berlusconi à Benoît XVI, devait s’ouvrir ce matin en Italie, mais a été reporté après que le premier eut signalé qu’il ne serait pas là et l’autre qu’il ne serait plus là le jour où le premier se déciderait à venir. Le juge s’est donc tiré une balle dans la tête.

# On annonce que le dernier disque de Céline Dion est sorti. Si seulement ça pouvait être vrai !


Je termine avec la meilleure (qui n’est pas de moi, évidemment) :


# Une enquête a été menée auprès d’un millier de femmes de chambre, dans des hôtels des USA. À la question « Accepteriez-vous de tailler une pipe à DSK ? », 7 % ont répondu « oui », 11 % « non », et 82 % « plus jamais ».


mercredi 13 juillet 2011

Le goût de capsule


Alors que j'exposais dans cet autre article toute la frustration que peut ressentir l'amateur de vin lorsque son précieux nectar se voit gâché par un infâme goût de bouchon, j'ai négligé dans la foulée de vous faire part de quelques réflexions sur le vin.

Quoi ? Moi, un Belge buveur de bière et mangeur de frites, des réflexions sur le vin ? Mais oui !

Et tout d'abord, n'hésitons pas à faire hurler les puristes en criant « haro sur le bouchon de liège ! »
(Soit dit en passant, et même si ça n'a rien à voir, des bouchons sur l'autoroute en direction de Liège, on en a tous les jours !)
Sus au bouchon, donc. Et vive la capsule ! Non, non, ce n'est pas la bière qui me monte à la tête. Je ne fais qu'exposer une réalité : pour ce que nous faisons du bouchon, une capsule conviendrait tout autant.

À quoi le bouchon sert-il, en dehors de fermer la bouteille pour empêcher le précieux liquide de s'en écouler quand et où il ne faut pas ? Je pose la question. Et voici la réponse : à rien.
Le bouchon ne sert à rien.

Je devine les visages sceptiques, j'entends les cris indignés. Et pourtant, dans la plupart des cas, le bouchon n'a pas d'autre fonction. Bien sûr, si vous stockez longuement dans votre cave les grands crus du Bordelais, vous savez que j'écris une connerie ; mais je m'en fous car il est certain que celui qui possède ce genre de cave ne perd pas son temps à lire les articles que je publie sur mon blog.

Pour le vin « de garde », le bouchon joue un rôle très important, en dehors de celui de fermer la bouteille : assurer un échange subtil, lent et parfaitement dosé, entre le précieux nectar et l'air de la cave. Ce qui sous-entend également que celui qui souhaite conserver longuement du vin pour le laisser vieillir et « bonifier » a tout intérêt à être l'heureux propriétaire d'une cave de qualité : température et taux d'humidité stables, orientation et aération optimales, absence de vibrations... Il lui faut aussi maintenir un carnet de cave et un sens de l'ordre et de l'organisation, histoire de ne pas devoir remuer une vingtaine de bouteilles avant de trouver celle qu'il cherche.

Alors, si dans votre cave vous stockez des choux ou des pommes de terre, faites pousser des champignons et des endives, entreposez des détritus, installez une citerne à mazout, une chaudière ou un congélateur, subissez des remontées de miasmes en provenance des égouts... n'y stockez pas du vin. Pas longtemps, en tout cas.

Et puis, les gens comme moi, les épicuriens aux finances modestes, quand ils achètent du vin, c'est pour le boire. Pas nécessairement tout de suite, mais rarement dix ans après son acquisition. Alors, un bouchon synthétique ou une capsule, ça convient pour presque tout le pinard qu'ils achètent.

Et avec une capsule, le vin ne sent pas le bouchon.

Un petit sauvignon, un riesling, un chardonnay qui sent le bouchon, c'est tellement navrant ! Ce n'est pas le genre de vin qu'on laisse vieillir. On le boit jeune, sur le fruit, sur la fraîcheur. Alors, foutez la paix aux pauvres chênes-lièges.
Pareil pour un vin de primeur, pour un rosé gouleyant qui accompagne les grillades et l'assiette de charcuteries ou pour la majeure partie de ceux que nous buvons à toute occasion.

Moi, je n'ai pas de Château Petrus dans ma cave. J'ai du vin pour le boire dans les cinq ans. Alors, si c'est pour qu'il sente le bouchon...

Et tant que j'y suis, je vais donner un coup de pied au cul d'une autre idée reçue : la température de service d'un vin rouge. Il paraît qu'un blanc, un rosé, ça se boit frais et qu'un rouge, ça se boit tempéré. Certains disent « chambré ». Quelle horreur !

Le blanc, le rosé : réfrigérateur ou, mieux, seau à glace. Ça s'impose.
Le rouge : température de cave. Si votre cave se maintient vers les dix à douze degrés, c'est bien.

Un bon vin servi trop chaud, c'est presque aussi navrant qu'un bon vin qui sent le bouchon. Dans votre verre, dans votre bouche, dans votre gosier et dans votre ventre, le nectar trop froid aura tout le temps de s'échauffer. Alors que servi trop chaud, il ne refroidira pas. Et, à moins d'avoir affaire à l'un ou l'autre rouge très léger, le seau à glace ne sera d'aucun secours.

Moi, le rouge un peu frais, j'aime bien. Ce n'est pas du gâchis, n'en déplaise à certains. C'est une palette de sensations qui évoluent agréablement : un peu de fraîcheur en bouche, c'est agréable.

Souvent, nos maisons sont trop chaudes. Un rouge servi à température ambiante, ce n’est pas bon.
Un rouge servi à température « idéale » (elle est souvent indiquée sur la bouteille par les viticulteurs soucieux qu'on déguste leur produit dans les meilleures conditions), ça exige un énorme sens de l'anticipation. Comment amener le nectar à seize degrés pile-poil au moment de le déguster sur le rôti ? Des convives un peu en retard, un apéritif qui se prolonge, un incident en cuisine... et c'est fichu : trop chaud !
Et puis, servi à seize degrés (ou dix-huit, ou quinze... voyez les conseils des spécialistes), le vin sera-t-il bu dans les cinq minutes ?

Conseil de Belge : servez votre rouge à température de cave.

Voilà.
Et cet article m'a fichu une de ces soifs...

À votre santé !

vendredi 1 juillet 2011

Canicule


8 h 01

Madame, Mademoiselle, Monsieur, bonjour. Et tout d'abord, merci d'être avec nous pour vivre ensemble le début de cette journée qui s'annonce caniculaire. Vous l'avez entendu : ce matin, nous enregistrons des perturbations dans les transports en commun. Nous rejoignons tout de suite Louis Dubus, qui se trouve en ce moment tout près du dépôt central du TEC, à Liège Robermont. Alors, Louis, que se passe-t-il ? Les autobus ne seraient-ils pas sortis du dépôt ?

Eh bien, si, Georges, les bus sont sortis. Du moins ceux dont les conducteurs prenaient leur service tôt ce matin. Mais dès sept heures, les véhicules sont rentrés un par un au dépôt, le personnel du mouvement ayant entamé un mouvement de grève pour réclamer de l'eau fraîche, en prévision des températures annoncées pour aujourd'hui.

N'avaient-ils pas déjà de l'eau ?

Oui, Georges, c'était déjà prévu, comme me l'a confirmé la porte-parole de la direction du TEC Liège, mais les conducteurs réclament trois litres de plus, soit une quantité de six litres pour leur journée. Les discussions sont en cours, mais selon nos premières informations, une proposition à quatre litres et demi a été rejetée.



9 h 15

Et voici un nouveau flash d’information consacré aux conditions caniculaires annoncées pour aujourd’hui. Comme toujours à la pointe de l’actualité, nous n’hésiterons pas à interrompre nos émissions habituelles pour vous tenir au courant de ce qui pourrait se produire en divers points de notre pays, tout en espérant que nous n’aurons à déplorer aucune tragédie. Nous allons interroger notre spécialiste Paul Faydouf, à l'institut de météorologie. Alors, Paul, confirmez-vous les prévisions d’hier ?

Hélas ! oui, Georges, je dois les confirmer. À l’heure présente, nous enregistrons déjà 19 degrés en Campine et en Gaume, et 14 degrés en bord de mer. Les derniers modèles statistiques prévoient une évolution vers des températures caniculaires de 31 à 33 degrés dans le centre, avec des pointes à 34 voire 35 par endroits, dans le sud du pays et dans le Limbourg. La côte ne sera pas épargnée, avec des pics à 27 degrés et une température de l’eau s’élevant à 15 degrés. Du jamais vu !

Peut-on donner des conseils à nos téléspectateurs ?

Oui, bien sûr, Georges. Et tout d’abord, de ne se déplacer qu’en cas d’absolue nécessité et de cesser de travailler aux heures les plus chaudes, soit entre onze et dix-huit heures. Il faut bien s’hydrater, en évitant les bières trappistes, trop alcoolisées, et les sodas, toujours trop sucrés. Si vous n’aimez pas l’eau plate, la bonne chope reste rafraîchissante à condition de ne pas en abuser, surtout si vous devez prendre le volant. Soyez prudent avec le vin blanc frais et le rosé, surtout en bag-in-box, toujours sévères pour le crâne. Ne sortez pas les barbecues, il fait assez chaud comme ça.

Eh bien, merci mon cher Paul. Nous rejoignons à présent Évelyne Marchand, réfugiée dans la galerie climatisée d’un grand centre commercial. Évelyne, m’entendez-vous ?

— …

Évelyne Marchand… c’est à vous.

Oui, Georges… aïe ! Faites attention, s’il vous plaît. Oui, disais-je… pardon… oui… je me trouve ici au milieu des caddies dans la galerie marchande, tout près de l’accès… oh là là… de l’accès à l’entrée et de la sortie des caisses… ouïe ! Pardon. Oui, passez par là, s’il vous plaît… Bon, je suis désolée, Georges, mais ici c’est intenable…

Déjà, Évelyne ?

Oui… Je vais me déplacer parce qu’ici, c’est de la folie. Les gens sont venus très tôt faire leurs emplettes et, surtout, d’importantes provisions d’eau… Il y a même des chauffeurs des TEC venus spécialement en autobus pour embarquer des bouteilles d'un litre et demi... Aïe ! Passez de l’autre côté, avec votre caddie, au lieu de me bousculer, bon sang ! Vous ne voyez pas que je suis sur antenne ?… Oui, c’est ça, faites coucou à la caméra et taillez-vous.

Évelyne ?…

Albert, attention !… Allons de ce côté…

Évelyne ?…

Attention au caméraman, madame… Non, ça, c’est mon micro… Oui, écartez-vous, s’il vous plaît. Ouaaaah ! Bordel ! Mes orteils ! Pouvez pas faire attention, espèce de… oups !

Évelyne Marchand ?… Évelyne, m’entendez-vous ?

Oui, oui, Georges… Excusez-moi… je…

Holà ! Évelyne, tout va bien ?

— …

On n’a plus l’image, là…

— …

Et plus de son non plus, apparemment. Évelyne ?… Évelyne Marchand ?…

— …

Bon. J’espère qu’il ne leur est rien arrivé de fâcheux, à Évelyne et à son caméraman. Nous tenterons de rétablir le contact avec eux tout à l’heure… Prenons à présent la direction de la capitale, avec Claude Volant, pour un point d’info routière. Claude Volant, c’est à vous.

Bonjour, Georges, et bonjour à tous. Eh bien ici, la situation est déjà préoccupante sur les principaux boulevards conduisant au centre-ville. La température est actuellement de 21 degrés et les automobilistes ont chaud dans les bouchons qui s’étendent sur plusieurs kilomètres. Aucun problème majeur n’est actuellement à déplorer, mais pour ceux qui ne disposent pas de la climatisation à bord de leur véhicule, la journée risque d’être difficile.

Merci, Claude. Nous nous retrouverons plus tard pour un autre point d’information.



9 h 55

De nouveaux problèmes dans les transports en commun, puisque par solidarité avec le TEC Liège, les chauffeurs des autres TEC ont également débrayé, ce qui fait qu'aucun bus ne circule dans le sud du pays. Du côté des chemins de fer, les retards s'accumulent : en cause, une surchauffe de locomotives sur la ligne Anvers-Bruxelles et sur la ligne Bruxelles-Arlon. Nous enregistrons pour l'instant une température de 22 degrés à Uccle.



10 h 40

Nous avons retrouvé Évelyne Marchand quelque part sur le parking de Cora City. Le caméraman ayant disparu, happé par la foule, nous ne sommes pas en mesure de vous offrir d'images, mais Évelyne a encore son micro. Évelyne, vous m'entendez ?

...

Évelyne Marchand ?

...

On a dû lui piquer son oreillette, à mon avis. Évelyne Marchand ?

Non, pas par ici, madame.

Évelyne, vous êtes à l'antenne. Évelyne, vous m'entendez ?

Comment ? Boire un verre ? Oh, oui, monsieur, quelle bonne idée ! Je vous suis et tant pis pour cette télé de merde. De toute façon, y a plus d'images, y a plus de son.

Évelyne ? Évelyne, IL Y A du son ! Bon, faut couper, là... Coupez !

Skkkrrrrkrkproum ! Blouîîîîîîîououîîîîîîîîîîîîîk !

Et elle a balancé son micro, en plus ! Coupez, bon sang !



11 h 38

Nous interrompons nos émissions pour un nouveau flash d'information. Sur la E411, la situation est préoccupante. Il y a des bouchons, apparemment. Rejoignons notre reporter au dispatching de la police, Éric Lafoire. Éric Lafoire, c'est à vous.

Oui, Georges. Ici, c'est le chaos. Le revêtement s'est soulevé sur plusieurs dizaines de mètres après le viaduc de Beez, et la circulation est à l'arrêt.

N'est-ce pas là le tronçon qui avait été refait récemment, Éric ?

Absolument, Georges. Si vous vous en souvenez, l'asphalte avait sauté après les lourdes gelées de l'hiver – jusqu'à sept degrés sous zéro, je vous le rappelle – et les pénuries de sel d'épandage. Le tronçon a été réparé, mais le cahier des charges ne prévoyait apparemment pas la résistance à une température de 24 degrés, comme nous en connaissons en ce moment. J'ajoute que dans l'autre sens, vers Bruxelles, la circulation est à l'arrêt en raison d'une collision entre deux voitures et un camion. L'accident serait dû à la curiosité des automobilistes, distraits par le soulèvement du revêtement sur la chaussée parallèle vers le Luxembourg.

Merci, Éric... Claude Volant nous appelle à présent, pour un point de la situation à Bruxelles.

Allo, Georges ?

Oui, Claude. C'est à vous.

Ici, c'est le chaos. La température est de 26 degrés et les gens se réfugient dans les stations de métro et jusque dans les tunnels. Les gestionnaires du réseau de la STIB ont jugé plus prudent d'arrêter la circulation des rames afin d'éviter des accidents qui pourraient être dramatiques. Plus personne ne met d'ardeur au travail, si l'on excepte les patrons de bistrot.



12 h 21

Chers téléspectateurs, les nouvelles qui nous parviennent sont alarmantes. Un train aurait déraillé entre Gand et Bruxelles. Luc Boulon est sur place.

Ici Luc Boulon, qui vous parle depuis la ligne Bruxelles-Gand, où un train est à l'arrêt en plein soleil. La chaleur a provoqué une dilatation anormale des rails qui, trop déformés, ne permettent plus le passage des trains. Le thermomètre affiche 29 degrés, c'est épouvantable. Les voyageurs attendent du secours, les pompiers devant arriver pour les ravitailler en eau.

Merci, Luc Boulon.

Allo ? Je suis à l'antenne ? Skrîîîîîîouîîîîî... Hips !... Allôôôôôô ?...

Qui parle, là ? C'est vous, Évelyne ?

Allo, Geôôôrges ? Allôôôô ? Hips !... Vous... m'entendêêêêz ?

On a retrouvé Évelyne Marchand, mais je pense qu'elle n'est pas en état de parler.

Geôôôrges !

Coupez-la, bon sang ! Merde ! On entend bien qu'elle a bu, mais personne ne voit que j'ai soif, moi !



13 h 30

Nous interrompons une nouvelle fois nos émissions pour un flash d'information. Retrouvons Claude Volant...

Oui, un autre drame s'est joué sur un boulevard de la capitale, où Olivier Maingain est resté coincé dans sa voiture, climatisation en panne, alors qu'il se rendait à une réunion. Des gens ont fini par briser une vitre pour parvenir à ouvrir les portes et une demoiselle, une néerlandophone de Linkebeek, s'est proposée pour le bouche-à-bouche, mais un membre du Voorpost qui se trouvait lui aussi sur place s'est interposé en disant « geen vlaams lucht voor een franstalig ». La police est intervenue et monsieur Maingain a été emmené sur une civière. Comme nous étions sans nouvelles, nous avons contacté Charles Michel, président du MR, dans l'espoir d'en apprendre davantage, mais dès que nous avons parlé d'Olivier Maingain, monsieur Michel nous a assuré qu'il n'y avait plus de problème Maingain. Nous n'en savons pas plus pour l'instant, mais ici, c'est effroyable, le thermomètre flirte
avec les 30 degrés.

Merci, Claude, vous nous rappelez dès que vous avez des informations.



14 h 45

Chers téléspectateurs, je prends le micro en l'absence de Georges Fadasse, qui a déclaré en quittant le studio – je cite : « Trop soif ! Je vais boire une chope, du moins s'il en reste. » En attendant son retour, nous faisons un point météo. À vous, Paul Faydouf.

Skrîîîîouîîîîîîî... ♪♫ Ein prôôôôsit ♫♫ ein prôôôôsit ♫ ♫ ♪♪ Broum ! Skrîîîîîîououououou...

Évelyne Marchand ? C'est vous ? On dirait qu'elle est tombée...

Allo ? Le studio ?

Qui est à l'antenne ?

Hé, attends, mademoiselle, j'mets l'écouteur... Oué, ici c'est moi, hein ! C'est pour vous dire que vot' madame elle est complètement torchée, hein !

Qui êtes-vous ?

J'passe à la télé ? Ousqu'elle est la caméra, bordel ? J'aimerais bien faire signe à bobonne, moi !

Il n'y a pas de caméra, monsieur. Il n'y en a plus. Coupez, bon sang !

Ah ! C'est la radio, alors ? Qué dommage ! Ici, c'est Oscar Berlu. Et j'dis salut à tous les copains.

Coupez, merde !

Allo, Georges ?

C'est coupé ?

Allo, Georges Fadasse ?

Ah ! Nous avons retrouvé Paul. Allo, Paul Faydouf ? Ici Séverine Rawette. Nous attendons votre bulletin météo, Paul. Quelle est la situation ?

Bonjour, Séverine. Il semble que nous allons atteindre les 34 et même 35 degrés aux heures les plus chaudes de l'après-midi. Mais le temps va rapidement devenir lourd et orageux. Les premiers éclairs et coups de tonnerre sont attendus en fin d'après-midi et en début de soirée. Les pluies seront abondantes. Les pompiers, la protection civile et les forces de l'ordre ont été averties, et un plan d'urgence sera mis en place, m'a-t-on assuré.

Merci, Paul. En quoi consisterait ce plan d'urgence ?

On parle de fermer tous les tunnels routiers de la capitale, qui risqueraient d'être inondés.



15 h 70

Allo ? Allo le studio ?

...

Allo ?... Le studio ?

Skrîîîîouîîîî... Évelyne Marchand, j'écouououte...

Évelyne, ça va ? Ici Luc Boulon. J'appelle pour dire que seulement une partie des voyageurs coincés dans le train a pu être ravitaillée en eau par des pompiers débordés de travail.

De l'eau ? Hips !... Z'est pas bon, de l'eau...

Oui, Évelyne, mais quand on a soif...

Skrîîîîouîîîîîî...

Évelyne ?... Évelyne Marchand ?

Beuuuuh... Eh ben s'ils ont soif... hips ! Z'ont qu'à attendre, hein ! Paraît... hips !... qu'il va pas tarder à... à dracher !... Hips !