samedi 19 novembre 2016

Actus alitées

En ce moment, on parle beaucoup d'élections : celles qui ont eu lieu, celles qui auront lieu. Avant elles, on suppute, on sonde, on projette, on promet ; après elles, on se gratte le crâne, on se réjouit ou on se désole, on s'interroge sur les causes et sur les conséquences, on essaie de comprendre pourquoi ça n'a pas marché comme on le souhaitait, comme on l'escomptait, comme les sondages l'annonçaient.

Les experts apparaissent, pareils aux milliers d'entraîneurs installés dans les gradins ou devant leur télé pendant le match, qui étalent leur science lorsque la partie est terminée, car après coup, c'est plus facile.

En ce moment, en parlant d'élections, on se rend compte que notre Monde est malade de sa démocratie, handicapé du suffrage universel. Les gens n'aiment pas leurs gouvernants et souhaiteraient du changement, mais les taux de participation médiocres aux élections sont bien souvent le reflet de l'apathie d'une majorité silencieuse qui choisit de subir en râlant plutôt que de faire l'effort de se rebeller, même pacifiquement dans un isoloir.

Certains « experts » de tout bord incriminent souvent l'abstentionnisme. Il faut d'abord inciter les gens à aller voter, à marquer leur avis et à le glisser dans une urne ; et quand ça ne marche pas, quand à peine la moitié des électeurs s'expriment, on accorde souvent une importance considérable à ceux qui se sont intéressés, au moment crucial, à autre chose qu'à l'avenir de leur pays. Dans chaque camp, on compte et on se dit que ceux qui ne se sont pas exprimés étaient certainement et majoritairement ceux qui auraient fait le bon choix, si seulement ils avaient eu l'envie de le faire.

Que pensent donc les silencieux ? Pour qui voteraient-ils ?

En Belgique, certains se posaient, depuis quelques années, la question inverse : à qui profiterait l'abstentionnisme ? Parce qu'en Belgique, comme dans une minorité de pays, le vote est non seulement un droit, mais aussi un devoir : il est donc obligatoire sous peine de sanctions.

Chez les libéraux, le projet avait été émis de rendre le vote facultatif. D'après leurs estimations (qui, comme beaucoup d'estimations, ne valent pas un pet de lapin), l'abstentionnisme leur aurait été probablement profitable...

Ils ont renoncé au projet, pour le moment tout au moins. Ouf !

Moi, le vote obligatoire, je trouve que c'est une bonne chose. J'en ai déjà débattu avec d'autres personnes, qui m'ont opposé leur conviction que s'abstenir d'aller voter constitue un acte politique. Bien que je respecte leur opinion, j'estime que l'abstention n'est un acte politique que dans la mesure où elle s'exprime par une action concrète : voter nul, voter blanc, manifester ouvertement son rejet du système ou, à tout le moins, de l'ensemble des candidats qui se présentent au suffrage. Pourquoi ne pas choisir ce jour-là pour aller manifester, pour aller distribuer devant les bureaux de vote des tracts invitant les électeurs à rejeter l'ensemble de la classe politique ?

Choisir ce jour-là pour rester dans son lit, aller à la pêche, faire du tourisme ou quoi que ce soit n'ayant rien à voir avec l'actualité électorale ne constitue pas, selon moi, l'expression d'une opinion politique. C'est de la paresse, de la désinvolture, de l'ignorance, de l'irresponsabilité... Les termes ne manquent pas !

Les gens qui se conduisent de la sorte, ceux qui ne s'expriment pas clairement ce jour-là, ceux qui ne profitent pas de leur droit de vote... ceux-là devraient perdre, jusqu'aux prochaines élections, le droit de râler contre les mesures prises par ceux qui auront été élus grâce à leur indifférence.

Enfin, droit ou devoir, réjouissons-nous de vivre dans des pays où le suffrage universel est une réalité. Il en est d'autres où c'est un rêve inaccessible.