lundi 17 août 2020

Coronavirus : ceux qui n'ont pas eu de bol... et les autres

 Le titre de cette bafouille peut surprendre. S'il laisse entendre que des gens ont été servis par la malchance, il laisse aussi supposer que ça n'a pas été le cas de tout le monde et que, comme bien souvent, le malheur et la détresse des uns ont pu arranger les affaires des autres.


Bien sûr, les malchanceux sont les plus nombreux si l'on considère que, même sans être ou avoir été personnellement atteint par la maladie, presque tout le monde a eu, au minimum, à en supporter les effets parallèles, en tête desquels le confinement, l'entrave à certaines libertés et l'obligation d'obéir à de nouvelles règles sanitaires et de distanciation sociale ; mais, d'un autre côté, si l'on range ces contraintes dans la catégorie des « maux nécessaires », le nombre de vrais malchanceux peut être revu sérieusement à la baisse.


Nous n'en sommes pas à l'heure des bilans, loin de là, mais je vais néanmoins me permettre de brosser un tableau très personnel de la situation telle que je l'ai vécue et la vis encore, additionnée d'informations glanées dans mon entourage ainsi que dans les médias. Voici donc...



Ceux qui n'ont vraiment pas eu de bol :


Parmi ceux-là, il convient en premier lieu de ranger les malheureux qui ne sont plus parmi nous pour témoigner de leurs souffrances. Le virus donne à penser que nous ne sommes vraiment pas égaux face à la maladie et que s'il n'est actuellement pas possible d'affirmer, comme dans la fable, que tous sont atteints, force est de constater que la majorité des personnes testées ne ressentent aucun symptôme, même si elles sont réellement porteuses du virus.

Les malchanceux sont donc ceux qui sont partis alors qu'ils n'éprouvaient aucune envie suicidaire, leurs familles, leurs proches.

Malchanceux aussi, même s'ils ont eu au bout du compte la chance de s'en tirer, ceux qui ont souffert longuement, à cheval entre la vie et la mort, et qui maintenant tentent peu à peu de reprendre une vie normale malgré les séquelles que leur a laissé leur combat contre le virus

Parmi les malheureux, n'oublions pas nos aînés, enfermés dans leur chambre en maison de repos, privés de visites, de sorties, de distractions, et qui souffrent probablement aussi bien moralement que d'autres physiquement. Les laissés-pour-compte de la pandémie, c'est bien eux !



Ceux qui n'ont pas eu de bol non plus :


La santé étant notre bien le plus précieux et plaie d'argent n'étant pas mortelle, pouvons-nous néanmoins oublier de ranger parmi les malchanceux ceux qui ont perdu leurs moyens de subsistance ? Certainement pas ! Des entreprises ont mis définitivement la clé sous le paillasson, des travailleurs se sont retrouvés sans emploi et, pour nombre d'entre eux, sans revenu, même de remplacement.

Pas de bol pour eux, c'est incontestable, d'autant plus que le marasme économique qui sévit un peu partout n'est pas de nature à relancer l'emploi. Les moins malchanceux, parmi ceux-là, ont pu retrouver un job, soit parce que leur mise au chômage n'était qu'une mesure transitoire, certes désagréable, et que leur employeur a repris ses activités, soit parce qu'ils ont trouvé embauche ailleurs.



D'autres qui n'ont pas eu beaucoup de bol :


Si conserver son emploi en ces temps difficiles peut être perçu comme une situation enviable, n'oublions pas que tous les emplois ne se valent pas : salaires et conditions de travail peuvent être très divers.

En tête de liste des malchanceux ayant conservé leur job, on peut mettre les courageux risquant leur propre santé, souvent au prix de conditions de travail rendues pénibles, pour sauver celle d'autrui. Personnel soignant, vous êtes les héros de cette pandémie : trop souvent exposés, parfois atteints à votre tour par la maladie, vous pouvez entrer dans la catégorie des moins chanceux parmi les moins chanceux quand, après des jours voire des nuits de dévouement, vous succombez à votre tour face à l'ennemi. Nous ne vous remercierons jamais assez !



Encore pas de bol !


C'est moins grave, certes, mais quand même ! Il est des travailleurs que la crise n'a pas épargnés, même s'ils n'ont pas eu à soigner eux-mêmes les malades. Parce que s'ils ont eu la chance de conserver leur emploi, ils ont par contre eu la déveine de devoir modifier leurs méthodes de travail, de bosser davantage à cause de la pandémie elle-même ou pour suppléer à l'absence de collègues malades. Nombreux sont, parmi ceux-là, ceux qui ont dû renoncer à leurs congés ou les reporter, non pas parce qu'un tour-opérateur a dû annuler leur réservation, mais parce que le boulot supplémentaire les a privés d'un repos auquel ils auraient eu droit.

Cela viendra plus tard, certes, mais quand ? Quand les beaux jours seront passés, peut-être...


Pas de bol non plus pour ceux qui ont échappé à tout ce qui précède, mais n'ont pas la chance de disposer d'un grand espace vital, style maison à la campagne avec terrasse et jardin, et qui ont dû s'organiser vaille que vaille en télétravail dans un petit appartement avec des enfants qui courent et crient, un partenaire irritable devenant peut à peu insupportable et un manque d'oxygène qui finit par nuire à la meilleure des santés nerveuses.




Après ce sombre tableau dans lequel j'ai probablement omis de citer d'autres malchanceux, veuillez m'en excuser, je vais m'autoriser quelques paragraphes consacrés aux veinards, le malheur des uns faisant souvent le bonheur des autres, c'est bien connu. Alors, voici...



Les veinards :


Ils ont parfois bossé dur, se sont décarcassés pour trouver des solutions, du matériel de soin, des équipements de protection... et ils ont gagné du pognon. Beaucoup. La loi de l'offre et de la demande étant ce qu'elle est, quelques malins se sont enrichis ou sont en passe de le faire grâce à un petit business juteux. Quand vous proposez à la vente ce que tout le monde a besoin d'acheter, la fortune n'est pas loin.

Les veinards les plus cyniques sont évidemment ceux qui prêtent. Avec intérêts. Les États s'endettent pour surmonter la crise, les banques se frottent les mains. Avec cynisme puisque lorsqu'elles sont en difficultés (comme en 2008), c'est aux finances publiques qu'elles font appel.


Il existe d'autres veinards qui, tout en ayant été privés de leur boulot pendant des semaines, voire des mois, ont néanmoins conservé leur salaire et leurs droits. Pas de chômage temporaire, non. Juste une période d'inactivité professionnelle néanmoins rémunérée comme si de rien n'était. J'en connais. Des tas. Ce n'est pas une majorité, tant s'en faut, mais une quantité non négligeable. Et, ne riez pas, certains d'entre eux sont actuellement en vacances, comme ils l'avaient normalement prévu.



Et celui qui rédige ces lignes, demanderez-vous, dans quelle catégorie se range-t-il ?


Eh bien, je vous l'avoue, je n'ai pas souffert du coronavirus, bien que des proches ont été testés positifs parce qu'ils en ressentaient les symptômes. Peut-être l'ai-je contracté sans m'en apercevoir. En tout cas, j'ai conservé mon job, mais j'ai dû revoir mes méthodes de travail. Les heures supplémentaires non prises en compte (autrement dit ni rémunérées, ni récupérables) ont été et sont encore mon lot. J'ai dû ouvrir régulièrement ma messagerie professionnelle pendant les deux semaines de vacances que j'avais prises... pour travailler dans la maison et au jardin.


Pas de bol pour mon blog, que j'ai négligé encore plus que de coutume, mais je demande à bénéficier de circonstances atténuantes. Enfermé dans mon bureau à longueur de journée devant mon ordinateur, télétravail oblige, je n'ai qu'une envie lorsque ma journée se termine ; sortir d'ici et prendre l'apéro sur ma terrasse.

Car j'ai du bol : un emploi stable, une maison, un jardin, une terrasse, une bonne petite vie de famille et – croisons les doigts – une santé convenable.




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