Je ne sais pas si vous avez entendu
parler de ça ou si vous l'avez lu dans le canard, mais les
États-Unis et la Chine envisagent de réduire leur pollution.
Incroyable, non ?
Bon, les States, ce n'est pas pour tout
de suite, quant à la Chine, elle prévoit d'arrêter de polluer de
plus en plus vers l'an 2030 ou quelque chose comme ça. Sans doute
qu'ils ont remarqué qu'à la longue, leurs flatulences seront plus
agréables à respirer que l'air ambiant.
Nous faisons les fiers, ici, en Europe
occidentale ; nous donnons des leçons, mais il me semble que,
question pollution, on a déjà donné. Et avant les autres. Parce
que notre industrie lourde du milieu du vingtième siècle, ça
n'envoyait pas que des effluves d'eau de rose dans l'atmosphère !
Chez nous, en Belgique, on parle de
black-out. De coupures d'électricité par manque de puissance de
production de nos centrales, au plein cœur du prochain hiver.
Electrabel – société productrice d'électricité passée aux
mains du privé et propriétaire des centrales nucléaires – nous
annonce même que le prix de l'électricité pourrait doubler,
prochainement. Manquent pas de culot !
Alors, pour ceux qui ne sont pas au
courant, j'explique.
Pendant de longues années, on nous a
expliqué à nous, Belges moyens, que notre électricité domestique
coûtait beaucoup plus cher que chez nos voisins parce qu'il fallait
amortir les nouvelles centrales nucléaires ; mais que bientôt
elle coûterait beaucoup moins cher, résultat de nos sacrifices
financiers consentis pour installer l'outil de production.
Ensuite, comme c'était toujours très
cher en dépit de l'amortissement des centrales, on a privatisé le
secteur – pardonnez le mot – en nous disant que ça permettrait
de faire jouer la concurrence et qu'au final, le consommateur
obtiendrait son énergie électrique à meilleur prix.
Actuellement, c'est toujours cher mais,
nous explique-t-on, c'est à cause des écologistes qui ont fait
voter la « sortie du nucléaire » et le démantèlement,
à moyenne échéance, des centrales nucléaires qui fonctionnaient
si bien (entendez : qui rapportaient de gros dividendes aux
actionnaires). Résultat, on manque de centrales, on ne produit pas
assez et il faut acheter l'énergie manquante à l'étranger (qui a,
lui, de belles centrales nucléaires qui sont la seule bonne
solution).
En réalité, nous avons en Belgique
plusieurs réacteurs à l'arrêt parce qu'ils sont défectueux et
menacent la sécurité de la population, en dépit des récriminations
des patrons d'Electrabel qui nous répètent que non, ça n'est pas
dangereux.
L'installation d'un gouvernement de
droite libérale redonne enfin de l'espoir aux tenants du nucléaire :
on pourrait prolonger la durée de vie des centrales. Nécessité
oblige, parce qu'on n'a pas d'autre solution pour répondre à la
demande, à court et moyen terme.
Évidemment, quand Electrabel
ponctionnait le gogo avec ses tarifs outranciers et redistribuait
généreusement les bénéfices à ses actionnaires en croyant que
« ça allait durer toujours », Electrabel n'investissait
dans rien du tout : ni dans l'énergie verte, ni dans d'autres
moyens de production, ni dans la modernisation de ses centrales à
présent presque toutes obsolètes.
Et maintenant, on nous demande de
casquer une fois de plus, en agitant la menace de coupures
intempestives pour bien effrayer le pauvre consommateur ; et
puis en lui redisant qu'il n'y a pas mieux que le nucléaire. Que les
éoliennes, ça gâche le paysage. Et puis, que ça rend les vaches
malades ! Et que le photovoltaïque, c'est improductif à cause
de notre météo de merde. Et que ça coûte trop cher à cause des
certificats verts que ces crétins d'écologistes ont promis à ceux
qui investissaient et qu'on ne peut plus payer à présent, faute de
moyens.
On ne précise pas qu'une grande partie
de ces certificats sont « bouffés » par des sociétés
qui ont flairé la bonne affaire en installant à leurs frais des
panneaux solaires chez les particuliers et en gardant pour eux les
fameux certificats verts. Eux sont bien servis, naturellement.
Et puis, que voulons-nous d'autre que
le nucléaire ? Des centrales au charbon, comme en Chine ?
Ils polluent, en Chine. En ville, il faut mettre des masques
respiratoires...
Ah ! La Chine. On y revient. À
défaut d'en sortir facilement, d'ailleurs.
Mais dès qu'on parle de la Chine, on
songe à la démocratie. J'ai entendu récemment que le nombre de
pays « démocratiques » serait en hausse constante. J'ai
mis les guillemets à « démocratique », parce que tout
le monde sait que « démocratie » signifie « cause
toujours », alors que « dictature » veut dire
« ferme ta gueule », comme nous l'expliquait Coluche.
En réalité, j'ai de plus en plus
l'impression que la démocratie fout le camp, même si le nombre de
pays s'appuyant sur un régime qu'on dit démocratique a tendance à
augmenter. Il suffit de se brancher sur YouTube, par exemple, et d'y
revoir de vieux sketches du précité Coluche, de Pierre Desproges et
même de Michel Leeb pour se rendre compte que la liberté
d'expression a pris un sacré coup dans l'aile. On ne peut plus
parler des races, des religions, des nationalités – même pour
rire – sans risquer un procès pour racisme, xénophobie ou
antisémitisme.
On ne peut même plus appeler « sourd »
un sourd, « aveugle » un aveugle et « handicapé »
un handicapé. Comme si ça changeait quelque chose à son état de
dire « malentendant », « malvoyant » ou
« moins valide » !
Tant qu'on nous occupe avec de telles
cornichonneries, on ne parle pas trop des méfaits du capital. Enfin,
si, quand même un peu : depuis le temps qu'on sait que le
Luxembourg est un paradis fiscal, maintenant on ose même le dire
tout haut. Et citer les noms de ceux qui en ont lâchement profité.
« En toute légalité », se récrient-ils.
Oui, en effet. Leurs magouilles
n'avaient rien d'illégal.
D'immoral, ça, c'est une autre
affaire.
Pendant ce temps-là, nos nouveaux
penseurs du gouvernement belge de « centre droit » nous
sortent sans rire de nouvelles idées pour réaliser les
indispensables économies : modération salariale, saut d'index
et, surtout, chasse aux fraudeurs. Pas les gros fraudeurs, non. Les
petits, les malheureux qui bossent un peu en noir pour arrondir les
fins de mois difficiles ; et puis les chômeurs qui sont
faussement domiciliés ici pour toucher les allocations réservées
aux isolés, alors qu'ils vivent là et devraient être considérés
comme cohabitants. Et savez-vous comment ils envisagent de vérifier ?
Au moyen des factures d'électricité ! Si, si.
Mais je ne vais pas encore parler
d'Electrabel, puisque j'ai déjà dit tout le bien que je pense de
cette société. Ce n'est d'ailleurs pas de sa faute si les chômeurs
trichent. Surtout les étrangers.
C'est ce que m'expliquait un quidam, il
y a deux jours, en bouffant sa pizza à une table voisine de la
mienne. Tous ces étrangers qui profitent de notre sécu et
encombrent nos prisons, il faudrait les renvoyer chez eux.
« Rendez-vous compte :
quarante pour cent d'étrangers dans les prisons belges »,
m'expliquait-il. Comme quoi les slogans à l'emporte-pièce balancés
par l'extrême droite ont encore trop de facilité à trouver des
oreilles où se nicher.
Quarante pour cent, ce n'est pas dans
toutes les prisons, tout d'abord. Et il y a aussi des centres fermés.
Et ce n'est pas parce qu'on est en séjour illégal (sans papiers,
réfugié) qu'on est un malfrat. On est généralement un malchanceux
qui a fui la famine ou la guerre pour trouver la misère et le
mépris.
« On ne leur a pas demandé de
venir », m'assénait le mec. « Les Italiens, si. On a
demandé. Mais les autres, là, les Marocains... »
Ben, si. On leur a aussi demandé de
venir. Les Italiens, c'était après la Deuxième Guerre Mondiale ;
les Marocains, au milieu des sixties (quand tout allait bien chez
nous et que la sidérurgie embauchait à tour de bras).
« Ouais, mais maintenant, y a
même plus de boulot pour les Belges », argumentait le quidam.
C'est vrai que ce n'est pas facile. Les
aînés doivent travailler plus longtemps (recul de l'âge de la
retraite) et gagner moins (modération salariale). Et les jeunes ne
trouvent pas de boulot.
Pour trouver du boulot, il faut être
jeune, diplômé, expérimenté, disponible à toute heure, ne pas
exiger d'être cher payé et posséder une voiture.
J'ai déjà parlé de ça avec de
nombreux jeunes et parents de jeunes. La réponse est quasi unanime :
de toutes ces qualités requises, il en manque toujours au moins une.
Ouaip...
RépondreSupprimer