Difficile de se pencher sur l'actualité
sans parler de la Grèce, d'évoquer le football sans songer au
pognon ou d'aborder le fast-food en ignorant délibérément le
cholestérol. Alors, je vais parler de la Grèce, parce que les deux
autres sujets précités, je les ai déjà abordés dans ces pages (*).
Je ne sais pas si vous êtes comme moi,
mais depuis quelques années j'ai du mal à associer ce beau pays à
l'idée de vacances sans éprouver une sorte de gêne, la même sorte
de gêne que j'éprouverais si je m'offrais deux ou trois semaines de
rêve dans un complexe hôtelier de luxe idéalement situé dans un
pays dont le peuple subit quotidiennement misère et maladies.
Je ne pense pas qu'il soit malvenu de
s'offrir des vacances chez les Hellènes, pour autant que cela donne
un coup de pouce au commerce local et contribue à tirer la
population de la mélasse dans laquelle elle a été fourrée bien
malgré elle ; mais serait-ce bien le cas ?
Toujours est-il que, lassés de se
serrer la ceinture, les Grecs ont voté pour le changement. C'est ce
qu'ils espèrent, tout au moins. Et ce ne sera pas un but facile à
atteindre.
Je souhaite de tout cœur qu'ils y
parviennent, parce que continuer à vivre ce qu'ils vivent, ce n'est
pas tenable. On a beau dire qu'ils ont mangé leur pain blanc avant
leur pain noir, qu'ils en ont bien profité pendant des années,
qu'ils ont falsifié les chiffres pour entrer dans la zone euro... il
me semble quand même que les responsables de ce fiasco sont à
chercher ailleurs que parmi ceux qui paient aujourd'hui cruellement
et injustement la facture pendant que d'autres continuent, devant
leur nez, à jouir de leur richesse et de leurs privilèges.
Il est des pays où les gens sont
pauvres et n'ont jamais connu que la pauvreté. C'est évidemment
très triste, et ceux qui parviennent à leur apporter de l'aide
malgré un environnement hostile (régimes rarement démocratiques,
conflits armés, corruption, maladies...) méritent toute notre
admiration. Il est aussi des pays dont la population se retrouve plus
pauvre (ou moins riche) qu'elle ne l'était autrefois. Se trouver
soudain privé du confort dont on a autrefois profité, c'est
difficile à vivre, ça crée de l'incompréhension, du
mécontentement, de la révolte.
La crise économique crée de la
pauvreté, mais entretient de scandaleuses richesses. Plus que
jamais, l'écart se creuse entre les plus pauvres et les plus
riches ; les classes moyennes, éternelles vaches à lait des
États, voient leurs membres se glisser, de plus en plus nombreux,
dans les rangs des malchanceux.
Comment ne pas comprendre les réactions
grecques ? Comment la colère ne gronderait-elle pas dans ce
pays ? Comment la tentation de conduire au pouvoir des leaders
aux idées radicales ne se ferait-elle pas de plus en plus
pressante ?
L'injustice, les privations,
l'austérité... donnent du grain à moudre aux adeptes d'idéologies
extrêmes maquillées d'un discours démagogique d'autant plus aisé
à tenir que les ouailles frustrées sont en attente d'un changement
qui n'arrive pas.
L'Histoire est rythmée par les
guerres ; et les guerres s'entourent d'avant-guerres,
d'après-guerres et d'entre-deux-guerres. Où sommes-nous
actuellement ?
Cette semaine, c'était le 70e
anniversaire de la libération du camp de concentration d'Auschwitz
par les troupes russes, en janvier 1945. Quelques centaines de
survivants étaient présents, certains ont pris la parole. L'un
d'entre eux rappelait qu'on ne devrait plus jamais s'en prendre aux
gens pour ce qu'ils sont.
Toute l'agitation, toute la violence
qui nous entoure, tous les événements dramatiques qui font
l'actualité nous rappellent à quel point la paix, la démocratie,
l'égalité de droits... sont choses fragiles quotidiennement mises
en danger.
Nous, les Occidentaux, nous qui
détenons la Vérité ; nous qui sommes le Modèle de Société ;
nous qui valorisons l'esprit d'entreprise ; nous qui défendons
la liberté d'expression ; nous qui soutenons le suffrage
universel ; nous qui n'avons jamais apporté la violence dans
d'autres pays, sur d'autres continents ; nous qui n'avons jamais
tenté d'imposer à d'autres notre culture, nos religions ; nous
qui n'avons jamais confondu autorité civile et autorité
religieuse ; nous qui avons toujours prôné l'égalité des
sexes, le droit à la différence, l'esprit de tolérance ; nous
qui n'avons jamais établi de colonies ; nous qui avons toujours
respecté le bien d'autrui ; nous qui savons tenir nos
promesses ; nous qui ne renions pas notre parole ; nous
qui... nous qui sommes pétris de qualités, comment tolérons-nous
toutes ces injustices, toutes ces aberrations ?
Comment pouvons-nous un jour nous
moquer de certaines personnes et trouver ça normal parce que notre
liberté d'expression le permet ; et le lendemain lever nos
boucliers et protester en chœur contre une phrase maladroite égarée
dans une interview ou vilipender une poignée de guignols qui
brandissent dans un stade un calicot à l'humour bas de plafond ?
Comment pouvons-nous estimer que non, vraiment, là on ne fait pas de
mal (aux autres) ; mais qu'ici, oui, il faut trouver un article
de loi ou en créer un pour qu'on ne puisse plus nous faire de mal, à
nous ?
Tout cela n'est pas bien gai et nous
éloigne de la Grèce à défaut d'enterrer nos problèmes !
Pour en revenir à la Grèce, donc,
comment ne dirais-je pas un petit mot pour Demis Roussos (je vous
épargne son vrai nom au complet), ce grand chanteur qui nous a
quittés, comme bien d'autres avant lui et comme d'autres le feront
après lui ?
J'aimais bien ses chansons, les
vieilles, celles des années Aphrodite's Child et
quelques autres qui ont suivi, dans les seventies.
Après, ce fut autre chose, bien sûr, mais il en faut pour tous les
goûts, n'est-ce pas ?
Il
n'empêche que j'aime toujours bien les premiers albums, les trois
des Aphrodite's Child,
vous savez, ce groupe qu'on identifie toujours à Demis Roussos mais
dont le maître à penser, principal compositeur et arrangeur,
n'était autre que Vangelis Papathanassiou, qui sera mieux connu plus
tard sous son seul prénom Vangelis
(et c'est mieux comme ça, pour les étiquettes sur les cassettes et
les disques).
J'aurais
bien aimé qu'ils restent ensemble, parce que la musique de Vangelis
et la voix de Demis, c'était une association du tonnerre de Dieu ;
mais las ! Vangelis voulait composer des musiques plus
élaborées, dans la veine de 666,
le dernier des trois albums du groupe, et Demis voulait continuer à
chanter des chansons et passer à la télévision. Impossible de
donner tort à l'un comme à l'autre, au vu de ce qu'ils ont réalisé
et des objectifs qu'ils ont atteints !
Bye,
bye, Demis Roussos ! Il nous reste les enregistrements, les
vidéos sur YouTube et une voix inimitable qui, une fois dans la
tête, en sort difficilement. En témoin le clip ci-après (**).
(*) Edit. 31/01 : De plus rapides que moi à la détente auraient sans doute ajouté qu'il est difficile de parler de Grèce sans songer immédiatement aux frites, mais c'est quand même un peu facile comme liaison avec le cholestérol. Et puis, les frites, en bon Belge, j'en ai déjà causé aussi.
(**) Edit. 32/01 : En sus d'avoir une voix extraordinaire, dois-je ajouter que Demis était très beau ?
(Un artiste talentueux surpris en plein travail est d'ailleurs toujours très beau. Si vous me surpreniez en plein travail en ce moment sur mon PC, vous ne me trouveriez certainement pas très beau, mais je ne suis pas un artiste, hélas !)
(**) Edit. 32/01 : En sus d'avoir une voix extraordinaire, dois-je ajouter que Demis était très beau ?
(Un artiste talentueux surpris en plein travail est d'ailleurs toujours très beau. Si vous me surpreniez en plein travail en ce moment sur mon PC, vous ne me trouveriez certainement pas très beau, mais je ne suis pas un artiste, hélas !)
Bravo ! Excellent article !
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