lundi 25 avril 2011

Scandale au village


Thérèse, tu me tues !

C’est inconcevable. Je ne peux pas admettre que tu me quittes ainsi sur un coup de tête, sur une impulsion, sur un caprice. Tu as balayé d’un seul coup de brosse les instants merveilleux que nous avons vécus ensemble tous les deux toi et moi. Pourquoi ?
Je veux bien admettre que parfois les occasions se présentent d’échapper à la routine quotidienne journalière qui, de jour en jour, peut contribuer à ce qu’une certaine latitude s’installe au sein même du cœur d’un couple bien établi. Mais quand même ! Est-ce une raison suffisante ?
Est-il vraiment mieux que moi, celui à qui tu t’offres à présent ? Est-il plus grand, plus beau, plus jeune, plus fort, plus intelligent, plus cultivé, plus riche, plus puissant, plus drôle ? A-t-il des relations ? Un sexe plus gros que le mien ? Est-il, grâce à cela et à tout le reste, mieux introduit que moi dans certains milieux ?

Thérèse, tu exagères !

N'étions-nous pas bien ensemble en couple à deux ? Est-ce cette soirée passée au Youp-la-la-Club qui a influé sur ton comportement ? Je sais, je n'aurais pas dû boire autant, et quand j'ai eu des nausées, je n'aurais pas dû vomir de la gerbe dans le jacuzzi. Je n'aurais pas dû non plus crier une gueulante vers le type qui dansait avec toi en te serrant très fort, même s'il avait tendance à promener ses mains baladeuses dans des endroits interdits où il ne pouvait pas aller sans y être autorisé.
Quand les sorteurs m'ont sorti par la porte d'entrée (c'est bizarre, ça) et que tu n'as pas voulu me suivre illico tout de suite (deux heures à prendre patience à t'attendre dans la voiture), j'aurais dû me douter qu'il y avait lézard sous pierre ; j'aurais dû t'abandonner là au lieu de rester tranquillement garé en stationnement sur le parking comme un chauffeur de maître pour Madame. Mais quand même ! Je n'imaginais pas ça.

Thérèse, est-ce vraiment fichu ?

Hier, nous étions là à t'attendre. Tu m'avais promis d'être là bien présente. Tout le monde était là aussi : la famille, les voisins, les amis, le maire et le curé. Je t'ai téléphoné, mais en vain. Raoul est allé sonner à ta porte, au bout de la rue, en te suppliant de venir, au moins un peu, juste une heure, pour sauver les apparences, mais tu as fait la sourde oreille pour faire semblant de ne rien entendre.
Nous avions tout prévu, tout commandé : le champagne, les zakouskis, les amuse-bouche et les amuse-gueule ; et même le cousin Albert pour la musique.
Alors pourquoi ? Pourquoi ?

Franchement, Thérèse, tu me déçois !

Tu aurais quand même pu attendre deux ou trois jours de plus avant de me quitter et de t'installer chez l'autre. Tu aurais pu sauver un tout petit peu les apparences, non ?
Ah ! J'ai eu l'air con, moi, devant la famille, les voisins, les amis, le maire et le curé !
Quand le journaliste est arrivé pour la photo, à l'heure où le maire devait faire son discours, tu n'étais pas là. J'étais seul dans mon costume trois-pièces avec gilet. Franchement, tu aurais pu avoir le courage de faire l'effort de venir !
Merde, Thérèse ! Soixante ans de mariage, ça valait quand même le coup, non ?

jeudi 21 avril 2011

Et vous aimez vraiment ça ?

Je vous entretenais récemment, entre deux crises de flemme particulièrement aigües, du degré zéro de diverses choses ; et je me suis demandé dans la foulée pourquoi de telles nullités pouvaient encore exister.

Le « fast-food », par exemple... Tout le monde sait bien que c'est gras, déséquilibré, relativement cher et que ça fait grimper le taux de cholestérol. Tout le monde voit bien que c'est médiocrement servi dans des lieux aussi attrayants que des halls de gare et aussi garants d'une saine digestion qu'un tour en montagnes russes sur un champ de foire. Et pourtant, ça marche. Ceux qui vendent ça se disent sans doute que les gens aiment bien les trucs gras, pas sains, bourrés de produits chimiques...

Vous aimez bien, vous, de bouffer des bâtonnets de poisson ou de poulet sans être sûr qu'il y a bien là-dedans du poisson et du poulet ? Sans être sûr qu'ils ne sont pas composés d'ingrédients de provenance douteuse enveloppés d'une sorte de chapelure et frits dans une huile qui aurait peut-être dû être jetée depuis quelques jours déjà ?
Accepteriez-vous qu'on vous serve, sans qu'elle ait été passée à la moulinette auparavant, la tranche de « pur boeuf » qui farcit votre petit pain ? Mieux : parviendriez-vous seulement à la mastiquer ? On ne vous sert pas de la merde, mais c'est tout comme. Les gens n'ont pourtant pas des goûts de chiottes ! Ils ne seraient pas opposés à bouffer des denrées convenables, quand même !

Et je parlais de la téléréalité. Vous aimez ça, vous ? Ne trouvez-vous pas ça complètement débile ? Ceux qui pondent ces émissions se disent sans doute que les gens aiment ça. Ils pondraient des trucs vraiment chouettes, sans qu'on doive se prendre la tête, ce ne serait pas plus mal, non ?
Une seule chose m'a fait marrer à ce sujet, dernièrement ; c'est l'histoire de ces ex-candidats à je ne sais quelle suite d'âneries télévisées intentant un procès à l'organisateur de l'émission pour les avoir fait travailler en black. Travailler ! Demandez un peu à un « pelleteux » qui transpire sur les chantiers, sur le bord des routes, avec tous les risques que cela comporte pour sa santé, ce que c'est que travailler !
Cela dit, ça me fait rigoler, ce procès. Un peu comme quand un idiot et un filou se mettent sur la gueule.

Et puisque j'en viens à la télé ; ça vous intéresse encore, vous, la douzième confrontation de l'année entre les vedettes surpayées du « Real » et celles non moins surpayées du « Barça » ?
Et la vingtaine de privilégiés qui tournent en rond sur un circuit en brûlant des milliers de litres de carburant et en polluant la planète alors que des gens crèvent de faim ou n'ont même pas le droit d'ouvrir leur gueule à quelques kilomètres de là ? Vous aimez ça ?

Et les interminables pages de publicité qui vous obligent à baisser le son du téléviseur, ça ne vous casse pas les oreilles et le reste ? Savez-vous que c'est avec le fric de la publicité (donc le vôtre quand vous achetez les produits) qu'on vous sert les émissions les plus débiles ?

Et ça ne vous pose pas de problème de conscience d'aller bronzer idiot dans des hôtels de luxe en bord de mer en vous empiffrant de tout ce qui vous tombe sous la main parce que c'est compris dans le prix ? Ça ne vous gêne pas de prendre des vacances de riches dans des pays de pauvres ? Et ça ne vous interpelle pas, de vous dire qu'il vaut mieux éviter de quitter l'enceinte du club parce que c'est dangereux ?

Je sais, je sais. On ne peut pas porter sur nos frêles épaules toute la misère du monde. On ne peut pas renoncer à tout : à de la distraction, à des vacances bien méritées, au plaisir de boire et manger. On ne peut pas non plus s'obliger à acheter des produits fabriqués chez nous par des ouvriers correctement payés, justement parce qu'ils sont plus chers, ces objets. Pas beaucoup plus chers, mais plus chers. Juste assez pour qu'on achète les autres, un peu moins chers à la vente mais infiniment moins chers à produire, contribuant ainsi à l'enrichissement d'industriels qui étoufferont plus facilement dans le pognon que dans les scrupules.

Mais un jour, faites-vous plaisir sainement. Levez-vous tôt, faites votre marché. Les bons produits existent. Et les passionnés qui les fabriquent et qui les vendent seront ravis de vous en parler. Préparez-vous un bon petit repas, complet et varié. Mangez lentement (en posant le couteau et la fourchette entre chaque bouchée, au besoin), offrez-vous une bonne bouteille de vin. Ou mieux : une bouteille de bon vin. Et puis allez vous promener, allez respirer. Prenez des photos. Invitez des amis. Allez chez eux. Parlez à vos voisins. Prenez le temps de vivre, ça fait un bien fou. Et surtout, surtout, oubliez un peu la télé. Coupez votre ordinateur. C'est ce que je vais faire, d'ailleurs.

Allez, à votre bonne santé !




mardi 12 avril 2011

Le degré zéro

Dans mes moments de grogne les plus intenses, je pose sur le monde qui m'entoure des regards courroucés ou je me laisse aller à des soupirs de découragement. Je n'aime pas la fatalité, j'aurais même tendance à dire qu'elle n'existe pas, mais l'inlassable inventivité de la race humaine quand il s'agit de créer quelque chose pour en tirer un profit maximal me laisse parfois pantois.

Qu'on fasse bouffer par des poulets (ceux qui ont des plumes et des ailes) de la farine de poisson, qu'on ajoute de la graisse de je-ne-sais-quoi dans la pâte de cacao, qu'on fabrique du saucisson avec tout sauf de la bonne viande, qu'on fasse pousser de la cane à sucre ou des céréales pour les transformer en carburant alors que des gens crèvent de faim, qu'on déverse dans un lac africain des poissons qui n'avaient rien à y faire à part bouffer tous les autres, qu'on prolonge la vie de centrales nucléaires largement amorties mais devenues dangereuses, qu'on fasse fabriquer au diable vauvert des denrées qu'on pourrait tout aussi bien produire chez nous en évitant des milliers de kilomètres de transport polluant... l'imagination humaine appliquée aux bénéfices est sans limites.

On en arrive à nous faire accepter le degré zéro de tout un tas de choses.

Le degré zéro de la gastronomie dans un fast-food qui sert des frites et des hamburgers graisseux ; le degré zéro de la culture dans des émissions de téléréalité où la connerie atteint des sommets insoupçonnés ; le degré zéro de l'éthique sportive dans des compétitions internationales où tout est pourri par le fric ; le degré zéro de la littérature dans des romans de gare bourrés de clichés et aussi piteusement édités qu'ils sont vendus à prix élevé ; le degré zéro de l'intelligence musicale dans des chansons préformatées interprétées par des vedettes préfabriquées ; le degré zéro de l'honnêteté quand un dictateur à qui on a vendu des armes devient tout à coup l'ennemi à abattre pour ceux qui essaient de se donner bonne conscience...

On peut trouver du degré zéro à tous les coins de rue, dans toutes les villes, dans tous les pays, dans toutes les cultures, dans les articles de presse ou parmi les messages qui circulent sur la Toile.

Celui-ci, par exemple, doit être le degré zéro de quelque chose. De l'optimisme, peut-être ?

Je vais aller me consoler avec un ballon de rouge. Le degré douze virgule cinq de la détente.

lundi 4 avril 2011

Le train de Trifouilly-les-Oies

LE PROF : Bonjour. Asseyez-vous... Kevin, restez assis. Alors ? En forme, ce matin, hmmm ? Vous avez bien étudié ? Mieux que la semaine dernière ? Ça vaudrait mieux, parce que j'ai ici vos résultats, et ce n'est pas brillant du tout !

LES POTACHES : Grrrmmmmblll...

LE PROF : Silence ! Olivier, voici les feuilles. Restituez-les à leurs propriétaires... Je veux ces interros signées par vos parents pour le cours de jeudi au plus tard, sinon c'est zéro.

KEVIN : (Qui reçoit sa feuille) Ben, j'ai déjà zéro.

LE PROF : En effet, oui.

KEVIN : J'dois pas la faire signer, alors, c'est plus la peine !

LE PROF : Erreur ! Les zéros, c'est comme les perles, Kevin : ça s'enfile ! Bon. Tout le monde a récupéré son interro ? Bien. Alors, maintenant, vous prenez une feuille A4, et...

LES POTACHES : (Dans un touchant ensemble) Hein ?

LE PROF : Oui, une feuille A4, parfaitement... Et je n'ai pas dit une feuille pour quatre, nom d'une pipe !

CHARLOTTE : Une blanche, m'sieur ?

LE PROF : Non, une verte, Charlotte, une verte...

CHARLOTTE : Mais...

LE PROF : La couleur que vous voulez, à lignes ou à carreaux, aucune importance, c'est pour une interreau !

KEVIN : Une interreau ?

LE PROF : Une interro, si vous préférez !

PASCAL : Nous, on préfère pas, m'sieur !

LE PROF : Silence !

JOËLLE : Vous n'aviez pas prévenu, m'sieur !

LE PROF : Et alors ? Est-il indispensable de vous avertir d'un contrôle ? Sûrement pas ! Non, mais... Au vu des résultats de la semaine dernière, je vous offre une chance de vous rattraper avant de rentrer vos cotes pour le bulletin. Vous devriez vous en réjouir ! Et maintenant, vous indiquez votre nom, en haut à gauche, et la date, en haut à droite. Je le précise, parce que c'est fou ce que vous oubliez souvent de mettre votre nom ! La gêne, sans doute ! Bon. Première question...

LES POTACHES : Hé ! Pas si vite, m'sieur !

LE PROF : Dépêchez-vous ! On n'a pas que ça à faire ! Je ne comprends pas pourquoi ça vous prend autant de temps d'écrire votre nom !

LES POTACHES : Pffff...

LE PROF : Et pas de commentaires, je vous prie. Première question : si le train quittant la gare de Trifouilly-les-Oies à sept heures cinquante-quatre a dix-huit minutes de retard, le machiniste parviendra-t-il à combler ce retard avant d'arriver en gare de Sensenruth-sur-le-Sec, distante de cent quatre-vingt-trois kilomètres, s'il roule quatre pour cent plus vite que la vitesse maximale autorisée de cent trente kilomètres à l'heure, sachant que... comment ?

LES POTACHES : Pas si vite, m'sieur !

LE PROF : Je répète... Si le train quittant la gare de Trifouilly-les-Oies à sept heures...

KEVIN : Comment ça s'écrit, Trifouilly-les-Oies ?

LE PROF : Avec ton stylo à bille, mon garçon. Parce que ça ne s'écrira pas tout seul, crois-moi... La gare de Trifouilly-les-Oies à sept heures cinquante-quatre... a dix-huit minutes de retard... le machiniste... et cessez de soupirer !

KEVIN : Oui, mais...

LE PROF : Mais on s'en fiche, Kevin ! Aucune importance ! Écris ça comme tu veux ! Je continue... Le machiniste parviendra-t-il à combler ce retard avant d'arriver en gare de Sensenruth-sur-le-Sec... de Sensenruth-sur-le-Sec... écrivez ça comme vous voulez, ça m'est égal ! De Sensenruth-sur-le-Sec, distante de cent quatre-vingt-trois kilomètres, s'il roule quatre pour cent plus vite... j'ai bien dit : quatre pour cent plus vite... que la vitesse maximale autorisée de cent trente kilomètres à l'heure, sachant que... sachant que... oui, je ralentis. Tant pis si le train n'arrive pas, hein ! Sachant que la locomotive est d'un modèle ancien, qui ne pourra dépasser la vitesse maximale que de deux pour cent... je répète : de deux pour cent, dans la côte d'Outsiplou, longue de quatre kilomètres et qui débute exactement à mi-parcours...

LES POTACHES : Hhhuuuuh ?

LE PROF : Mais non, ce n'est pas compliqué. D'ailleurs, je ne vous demande qu'une seule réponse.

BRIGITTE : Facile à dire !

LE PROF : Oui, une seule réponse, Brigitte. Oui ou non. C'est tout. Oui, il parviendra à combler son retard ; ou non, il ne parviendra pas à combler son retard. C'est simple, n'est-ce pas ? Oui ou non. Vous n'avez qu'une chance sur deux de vous tromper, bande de nuls ! Voilà. Et nous passons à la seconde question.

LES POTACHES : Pffff...

LE PROF : Plus on soupire, plus on se dégonfle, ne l'oubliez pas. Voici la deuxième question : expliquez le paradoxe écologique qui...

LES POTACHES : Hhuuuh ?

LE PROF : Un paradoxe, oui. Un paradoxe. C'est dans votre cours, bande de sous-développés. Un paradoxe, c'est par exemple de vouloir confier l'avenir de la planète à une génération telle que la vôtre... Non, ne cherchez pas à comprendre. Voici donc cette deuxième question : expliquez le paradoxe écologique établissant que plus il y a de soleil, moins on a d'énergie.

LES POTACHES : Hhuuuh ?

LE PROF : Eh ben ! Heureusement qu'il fait souvent nuageux, par ici ! Oui, plus il y a de soleil, et moins on a d'énergie, parfaitement ! Alors, en quoi est-ce un paradoxe écologique ? Hmmm ? Nous l'avons expliqué en long et en large la semaine dernière...

CHARLOTTE : J'étais malade, m'sieur, et...

LE PROF : Vous êtes tout le temps malade, Charlotte. Vous disposez d'une santé précaire qui finira par nous asphyxier la caisse de la sécu. Une semaine vous êtes malade, la suivante vous recopiez les cours que vous avez manqués. Donc ça vous épuise et vous retombez malade !

CHARLOTTE : Ah, là là !

LE PROF : Silence ! Et Jean-François, regardez devant vous ! Sur votre feuille, oui ! Pas sur celle de Marie-France ! Et voici la troisième et dernière question.

BRIGITTE : Trois questions ?

LE PROF : C'est pas assez ? Vous en voulez plus encore ?

LES POTACHES : Pfff... Rrommgnongnon... gnon gnon... rogngngn...

LE PROF : Sileeeeeeeeeence ! Troisième question. Et soyez attentifs, parce que je ne répèterai pas. Si on suppose que la terre est parfaitement ronde et qu'on enroule une corde, parfaitement serrée autour de l'équateur, de combien cette corde se soulèvera-t-elle si on l'allonge d'un mètre ?

LES POTACHES : Hhuuuuh ?

LE PROF : Voilà. Vous avez dix minutes.

KEVIN : Vous voulez pas répéter, m'sieur ?

LE PROF : Vous avez dix minutes.

KEVIN : Heu... répéter la troisième question, m'sieur.

LE PROF : J'ai dit que je ne répèterais pas. Soyez attentifs, bon sang !

CHARLOTTE : (Bas) T'as étudié ?

BRIGITTE : (Bas) Hein ?

CHARLOTTE : (Bas) Tu connais ?

BRIGITTE : Pffff !

LE PROF : Silence, sinon c'est zéro !



ooOoo



LE PROF : Voilà. C'est terminé. Charlotte, ramassez les feuilles !

LES POTACHES : Hééé ! Non, m'sieur !

LE PROF : Vous avez disposé de largement assez de temps ! Charlotte, ramassez les interros... Non ! Tout compte fait, pas vous, Charlotte, ça va vous épuiser. Patricia, veuillez nous collecter les feuilles.

PATRICIA : On peut pas encore avoir un peu de temps ?

LE PROF : Non !

PATRICIA : Pfff...

LE PROF : Mais... dites-moi, Patricia... Heu... Votre mère ne dit rien, pour votre pantalon ?

PATRICIA : Dire quoi, m'sieur ?

LE PROF : Pour les coups de cutter que vous avez donnés dedans. C'est tout déchiré, coupé, effiloché.

PATRICIA : C'est pas des coups de cutter.

LE PROF : Ah non ? Vous avez fait ça comment ?

PATRICIA : Je l'ai acheté comme ça.

LA PROF : Ah bon ? Il est tout neuf ?

PATRICIA : Ben oui. C'est la mode.

LE PROF : Eeh ben ! Et ça coûte cher, un jean tout sale et tout déchiré ?

PATRICIA : Non, c'est juste 75 euros.

LE PROF : Nom de... Et... et vos parents vous paient ça ? Eh ben ! Et... et... posez vos stylos, vous autres ! Ce n'est pas le moment d'en profiter ! Brigitte ! Ramassez les feuilles pour l'autre rangée. Et en vitesse. Et activez, Patricia !

BRIGITTE : Oui, m'sieur.

LE PROF : Kevin, on peut savoir pourquoi vous riez ? Non ? Vous rirez sans doute moins quand vous recevrez votre bulletin... Merci, Patricia... Et... Heu... Merci aussi, Brigitte. Vous pouvez retourner vous asseoir. Et c'est préférable, d'ailleurs, vu la longueur de votre jupe... Les garçons, ce n'est pas la peine de siffler.

KEVIN : Elle a même pas d'culotte.

LES POTACHES : Ouaiiiiiis !

LE PROF : C'est fini, oui ?

BRIGITTE : C'est pas vrai ! J'en ai une.

KEVIN : Mon œil ! T'as qu'à la montrer, si tu veux qu'on te croie !

BRIGITTE : Chiche !

LE PROF : Silence ! Et vous, Brigitte, retournez à votre place. Et vous aussi, Patricia.

KEVIN : T'oserais pas !

LE PROF : Kevin, ça suffit ! Brigitte, descendez de l'estrade. Ce n'est pas la peine d'exciter votre monde !

LES POTACHES : Ouaaaah ha ha ha !

BRIGITTE : Voilà !

LE PROF : Mais... mais... Brigitte ! Baissez votre jupe, saperlipopette !

KEVIN : C'est pas une culotte, c'est un string !

LES POTACHES : Ouaaaaaiis !

LE DIRECTEUR : Eh bien bravo ! Heureusement que je passe dans le couloir. Alors, c'est comme ça que vous donnez votre cours, Dugenou ?

LE PROF : M... Monsieur le dir...

LE DIRECTEUR : Vous passerez me voir dans mon bureau dès la fin du cours.