jeudi 3 janvier 2013

L'hôtel de rêve

Après les fêtes de fin d'année et le début d'une autre qu'on espère meilleure, vient le temps des soldes et des achats à bas prix, parce qu'on peut rarement se permettre autre chose. Le mois de janvier est traditionnellement assez long chez nous, même s'il ne compte que trente et un jours, parce que les journées sont brèves, la météo souvent maussade pour ne pas dire franchement dégueulasse, et les jours fériés aux abonnés absents. En dépit de la récente prime – pour ceux qui en ont reçu une –, le compte en banque est plutôt à la déprime. Il ne nous reste plus qu'à rêver à des jours meilleurs, quand la météo plus clémente adoucira la facture de chauffage et quand les premiers rayons printaniers nous conduiront vers quelque terrasse où déguster une bonne bière d'abbaye.

Janvier c'est, outre les soldes et la déprime d'après les fêtes, outre la perspective de deux longs mois d'hiver, le temps d'ouvrir les catalogues en vue des prochaines vacances. Certains partiront bientôt « à la neige », d'autres attendront la mi-saison voire les longs congés estivaux.

Pour les grandes vacances, c'est maintenant qu'il faut réserver pour se garantir les prix promotionnels, quand on ne veut pas courir le risque de se fier à des « dernière minute » qui peuvent ne pas se présenter ou ne pas convenir. Rien de plus déprimant en effet que de rester sur le quai ou dans un hall lorsque les trains et les avions s'en vont vers des destinations de rêve, emportant dans leur ventre les plus prévoyants, les plus chanceux.

En piochant dans les catalogues des agences de voyages, j'avais justement repéré cet hôtel de rêve, celui dans lequel Chérie et moi envisagions de poser bientôt nos valises lors de notre escapade d'été. Mais pourquoi seulement nous fier à de belles images ou aux douces paroles de la charmante employée de l'agence, lorsque nous avons à portée de main une mine d'informations, une collection d'expériences, une flopée de témoignages rapportés par de précédents vacanciers ? Internet est là pour ça, entre autres choses.

Nous nous mettons donc en quête des références de notre hôtel de rêve, des avis de ceux qui l'ont fréquenté avant nous, et là... le doute soudain nous assaille. La belle cacherait-elle une vipère en son sein ?

Du positif, il y en a. Des cinq étoiles, des quatre étoiles, des « parfait », des « nos plus belles vacances », on en trouve. Et même majoritairement. Mais il y a d'autres témoignages qui donnent à réfléchir.

« Un 5 étoiles, ça ??? A peine un deux étoiles, et encore. »

C'est vrai que les étoiles, ça s'ajoute, ça se retire un peu comme dans le guide Michelin ; sauf que dans le cas qui nous occupe, ce ne sont pas les inspecteurs du guide en question qui les ont attribuées. Et puis, cinq étoiles à Paris ou à Bruxelles, ça n'a qu'un lointain, très lointain rapport avec la Voie Lactée apparemment descendue en pluie sur Tenerife, Bodrum, Marrakech, Agadir, Louxor, Capri, Rhodes ou Djerba.

C'est ce que je me dis en lisant les commentaires de ceux qui trouvent que l'hôtel n'a pas le niveau promis par le lustre de son enseigne. « Palace » est un mot aisément galvaudé ; surtout dans certains patelins très reculés de la vieille Afrique où la présence d'eau courante et d'une terrasse avec moustiquaire suffit à faire ressentir les effets d'un certain luxe lorsque les autochtones survivent dans le plus grand dénuement.

Mais les vacances au soleil, pour nous Européens, c'est un peu ce à quoi nous nous sommes accoutumés : un séjour de riches dans un pays de pauvres.

Je classe donc sans suite les avis de ceux qui se plaignent d'un nombre d'étoiles immérité. Ils doivent confondre la réelle portée des appellations. D'ailleurs, d'autres touristes semblent satisfaits, voire très heureux. Rien n'est perdu.

Il n'empêche que certains commentaires font un peu peur :

« Impossible de se relaxer nous étions envahis de mouches. »

« Odeurs nauséabondes d'eaux usées à certains moments, moisissure en formation dans certains joints de carrelage de la piscine, de grosses mouches noires en permanence dans les couloirs, mais le pire est la présence de cafards dans l'hôtel. »

Les mouches, je n'aime pas. Quand on sait où elles ont l'habitude de se poser et de forniquer, j'aime autant ne pas les voir prendre mon front en sueur pour un abreuvoir, mes bras et jambes pour une piste d'atterrissage et mon casse-croûte pour le leur. Quant aux cafards, je sais à quoi ça ressemble, mais je n'ai pas l'habitude d'en voir. D'ailleurs, chez nous, « cafard » s'utilise essentiellement au singulier et au sens figuré.

Pas drôle, ça. Et les cafards, d'autres personnes en font mention :

« L'accès à la plage se fait par un chemin de 800m en traversant une petite route et  le dépôt d'ordure de l'hôtel ! Présence de cafards ! 5 dans le mini frigo de la chambre durant nos 14J de vacances et de plus gros dans la salle de bain ou dans les toilettes .... »

Et des gros, en plus ! Il n'y a pas de fumée sans feu, affirme-t-on. Notre hôtel de rêve serait-il une arnaque pour touristes naïfs, un piège à cons, un nid de serpents ?

D'ailleurs, on n'en a pas fini avec les bestioles :

« Nid de fourmis sur la table de nuit »

Gasp ! Et ceci :

« quelle horreur cet hotel..super vieillot toilettes piscine plage super sales..piscine idem..il est grand temps de le moderniser un relooking simpose..nous avons logé dans une villa 3 chambres 3 salle de bain beurgbeurg ...des araignées dans le lit et l'eau des robinetteries toute jaune... »

Des araignées ! Chérie les a en horreur ! Non, c'est décidé, pas là-bas ! Pas dans cet hôtel de cauchemar !
D'ailleurs, nous en avons repéré un autre, d'hôtel, qui semble de bien meilleure qualité. Et les gens le disent :

« Je suis un hadèpte des hotels de ce pays »

Nous aimerions en devenir des « hadèptes » nous aussi, si toutefois les autres témoignages sont à l'avenant. Échaudés, nous ne nous attardons pas trop sur les commentaires flatteurs, même s'ils sont les plus nombreux, et orientons bien vite notre lecture vers les récriminations de vacanciers les plus grincheux.

« Le personnel est mechant ds ce restaurant, je n y remettrai plus jamais les pieds !!! »

Méchant ? Ce n'est pas bien. Les touristes ne sont pas là pour se faire rabrouer, insulter, malmener, molester... Quand on paie, on a droit à des égards !

« beaucoup de choix, mais au détriement de la qualité »

« La nourriture étant toujours la même, les touristes sont pris pour un troupeau de bétail à qui on prépare toujours un ragout des mêmes aliments ou alors on leur dépose les mêmes aliments avec tout simplement une sauce différente : rien ne se jette, rien ne se perd tout se réutilise. Sauf que dans ce cas c'est de la nourriture... »

La nourriture, ça a quelque chose de subjectif, pensons-nous. Il y a des individus qui n'aiment rien et se plaignent de tout, pensant qu'il n'y a que chez eux qu'on mange correctement. C'est à leur intention, sans doute, que les lieux touristiques croulent sous les pizzas et les hamburgers.
Passons.

« les couverts sont sales »

Là, c'est vrai que ça donne à réfléchir. La propreté des couverts, ce n'est pas juste une question de goût. Et la qualité du service non plus :

« Bref pour le prix payé, un service de... non, pas de service du tout !
Bref, un cauchemar !!! »

Le service, c'est important aussi.
Alors, ce second hôtel de rêve serait-il celui du cauchemar ?

Nous avons repéré sur les photos de beaux jardins et des piscines. Nous qui aimons la balade et la natation entrecoupée de longues siestes, ça devrait nous convenir.

« Si vous aimez vous lever à 5 heures de matin pour réserver un matelas, vous serez ravis. »

Nous préférons paresser au lit, en réalité. Mais nous n'allons pas en vacances rien que pour ça. Paresser ensuite au bord d'une piscine, nous aimons bien. Mais s'il faut s'allonger par terre, ça ne le fait pas !

« La piscine se décompose à vue d'oeil »

Parbleu ! Est-ce possible ? Une piscine qui se décompose ?
Nous en avions jadis une petite dans le jardin, pour les enfants, qui avait tendance elle aussi à se décomposer. Ou, plus précisément, à se dégonfler. Pas bien, ça.

« Quand à la piscine qui est magnifique, il faudra graisser pour avoir une place réservé sinon tous les transat sont recouvert de serviettes, souvent déposés par ceux là même qui sont en charge de la piscine, bref même là la magouille règne!!! »

Parce que ça ne coûte pas assez cher comme ça ? Il faut encore refiler du bakchich pour être correctement servi ? Et qu'en est-il du code vestimentaire ?

« En fin d'aprés midi nous allons dans la piscine couverte, et, stupeur, une femme voilée, toute habillée est entrain de se baigner dans la piscine !!! et aucun membre du personnel de l’hôtel n'intervenant pour expliquer à cette dame que ceci n'est pas sa baignoire personnelle... »

Et que dit-on des chambres ?

« Chambre face aux dépendances de l'hôtel d'à côté. Bruit perpétuel des climatiseurs et des serveurs passant sous les fenêtres avec leurs chariots. Claquements de portes toute la nuit. Aucune isolation. »

« Chambre quelconque, mal insonorisé avec des fuites d eau. »

« Le meilleur moment du séjour, c'est quand nous sommes montés dans l'avion pour le retour. »

Avec un soupir de résignation, nous quittons les commentaires à propos de cette destination. Pas pour nous. D'ailleurs, l'Afrique, c'est trop chaud. Et puis, c'est plein d'Africains.

Heureusement, il existe de bons hôtels au soleil dans notre bonne vieille Europe. Comme nous hésitions déjà au départ, nous n'avons plus qu'à nous rabattre sur les valeurs sûres.

« Cette hôtel n est pas un 4 étoiles la décoration est passé il y a tout a refaire les chambre sont une catastrophe ,la nourriture est ineffable et le midi les table du restaurant ne sont même pas mise se sont a nous de les mètre un vraie camping et autour de la piscine la journée il n'y a même plus de transat et même plus de serviette une vraie catastrophe. »

Ça commence fort ! Nous découvrons la suite...

« Pour avoir voyagé pas mal et tester un bon nombre d'hôtels, Je ne recommande absolument pas celui-ci ni cette destination d'ailleurs! Seul le petit déjeuner est correct. Les viennoiseries sont sèches ainsi que le pain, pas de choco ni nutella. »

Ouais, c'est vrai, ça : pas de Nutella. Un scandale.
Toujours les mêmes récriminations sur la bouffe. Chérie et moi, nous songeons une fois de plus que les gens sont difficiles et que s'ils veulent vraiment manger comme à la maison, ils feraient mieux d'y rester ! Nous n'attachons donc pas trop d'importance au chapitre « nourriture », apprenant à trier dans les commentaires ce qui est juste en rapport avec des goûts personnels plutôt qu'avec la réalité.

« la soit disant paella insipide est compose de riz de petit pois je n'ais jamais vu de chorizo, jamais vu le safran pas plus d'une moule au metre carré pas grand chose d'autre à se mettre sous la dent
l'eau de la piscine ressemble plus à un bain de culture que à de l'eau de piscine »

Il n'empêche qu'une moule au mètre carré, c'est vraiment peu. Quant au commentaire alarmant sur l'eau de la piscine... Est-il un cas isolé ? Une médisance de grincheux ?

D'autres commentaires sont plus préoccupants :

« Au niveau du service là encore 0 pointé, nous avons découvert des gens antipathiques, que ce soit à la réception, aux bars ou au restaurant ! Peut être les français n'étaient pas les bienvenus... »

« déja a notre arrivé pas un mot de Français ensuite en route vers l'hotel dans le bus pareil pas un mot de Français, le lendemain RDV avec la résponsable de l'agence pareil pas un mot de Français et les propositions de visite pas en Français, donc si vous ne comprenez pas bien l'Anglais ou l'Allemand allez ailleurs. Pour le vol c'etait pareil aller et retour les hotesses ne parlent pas en ou ne veulent pas parler en Français. A croire que les Français ne sont pas les biens venus »

C'est quand même terrible, ça ! Des gens qui ne parlent même pas français. Ceux qui s'en plaignent semblent d'ailleurs éprouver des difficultés eux aussi dans la maîtrise de cette langue ô combien difficile !

« De jour en jour la situation se dégrade avec l'arrivée de personne non européenne. En fin de vacance, nous sommes une centaine de personne dont 80% de non européen. »

Et là, c'est pire encore : non seulement ils ne parlent pas français, mais en outre c'est rempli d'étrangers ! Et même pas Européens ! S'il faut passer ses vacances au milieu des sauvages, où allons-nous ?
Ah, ben non ! Justement. N'y allons pas. Restons chez nous.

Avec Chérie, nous faisons nos comptes. On va encore attendre un petit peu avant de réserver. Quitte à payer un peu plus cher.

Ou alors, nous resterons chez nous. Avec un peu de chance, il fera beau et nous pourrons bronzer dans le jardin. On organisera un barbecue avec les copains qui ne seront pas partis, et on fera péter le champagne.

L'hôtel de rêve n'aura qu'à rester un hôtel de rêve.

4 commentaires:

  1. il faut aussi se méfier des commentaires trop élogieux: j'ai lu quelque part que certains d'entre eux étaient rédigés par l'hôtel lui-même!
    en règle générale, les trucs pas chers dans des endroits de rêve, c'est du pipeau, que ce soit chez nous ou ailleurs et particulièrement dans les endroits dits paradisiaques et qui ne sont souvent que des pièges à touristes!!!
    l'année dernière, je suis allé au Vientam: via l'agence, nous avions réservé dans des hôtels pas très bon marché (au regard des coûts vietnamiens) mais au moins nous n'avons pas été déçus; les services étaient comme indiqués sur les sites, sans mouches ou araignées ou cafards. Les seules araignées que nous avons vues étaient sur les marchés: des mygales, frites et bien craquantes, à déguster sans modération, pour un prix très modique... pour les autochtones! Et aujourd'hui, je regrette de ne pas y avoir goûter... Mais ce n'est que partie remise!

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    1. Oui, on dit ça. Et les vilains commentaires par les concurrents.
      Il y a probablement un peu de ça, mais je dirais que la majorité des critiques vient de véritables vacanciers. Il faut en lire beaucoup pour se faire une idée à peu près juste de ce qu'on peut s'attendre à trouver. Typiquement : ne pas tenir compte des plus enthousiastes et des plus vilaines, mais accorder son attention aux avis les plus nuancés. Par expérience, je dirais que c'est ceux là qui sont les plus honnêtes.

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  2. À publier dans un "best-of" des hôtels douteux ?

    Non, mais ne t'en fais pas. Le plus simple, pour être sûr de ne pas être déçu, c'est d'emmener tes propres insectes.

    Voici d'ailleurs un site où l'on t'apprendra à élever tes propres blattes : http://insectes-et-elevage.over-blog.com/article-11305345.html

    Les autres touristes, européens ou pas, devraient être contents...

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    1. Ah, un best of ! Oui, mais c'est pas bien, de se moquer des gens. Je n'oserais jamais faire ça.

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