Parfois, quand il m'arrive de me dire
que le moment est venu d'écrire une petite bafouille pour mon blog,
je songe à tous ces chroniqueurs qui, inlassablement, hiver comme
été, avec juste une petite pause pendant les grandes vacances et
les fêtes de fin d'année, produisent quotidiennement et même s'ils
n'en ont rien à secouer un billet d'humeur ou un éditorial à
publier dans un journal ou à lire à la radio pour des gens qui vont
le lire d'un derrière distrait en grillant une clope ou vaguement
l'écouter entre deux flatulences alors qu'ils pestent au volant de
leur bagnole dans des embouteillages aussi prévisibles et répétitifs
que les come-back de Silvio Berlusconi en Italie, les chansons
interprétées par les candidats aux concours « The Voice »
ou les essais nucléaires de la Corée du Nord.
Bien sûr, ces braves gens qui nous
concoctent chaque jour un texte ou un monologue s'appuient
généralement sur des événements ou des personnages faisant
l'actualité, ce qui leur donne en principe assez aisément matière
à disserter ; mais lorsque de temps à autre les politiciens et
les fusils se taisent, les terroristes et les malfrats restent dans
leur lit, les spéculateurs sont au repos, les banquiers en prison et
la météo clémente partout, que vont-ils pouvoir raconter ?
Ont-ils quelque part sous les aisselles
ou au fond d'un tiroir un sujet passe-partout à sortir au moment
opportun à la façon de ces reportages qui servent de bouche-trou
dans les journaux télévisés lorsque l'actualité a toute l'énergie
d'un plat de nouilles trop cuites ?
Souvent, je pense à Thomas Gunzig.
Thomas Gunzig qui, chaque matin ou
presque, du lundi au vendredi depuis de longs mois et même plusieurs
années si ma mémoire est bonne, présente, sur la première chaîne
de la radio francophone belge, un billet d'humeur appelé « Café
serré » qui s'appuie lui aussi sur des faits d'actualité,
mais également sur et autour de la personnalité de l'invité –
politicien, syndicaliste, économiste, patron, politologue ou expert
en tout et en rien – qui sera interviewé au cours de l'émission.
Il fut un temps ou Thomas Gunzig me
faisait rire quand il traitait nos élus de « bande de cons »,
quand il brocardait la gauche, la droite, le centre et le Bon Dieu,
quand il balançait des vannes sur le MR et que Didier Reynders riait
jaune en déclarant qu'il aimait beaucoup ce type d'humour, quand il
se moquait des socialistes et qu'Elio di Rupo faisait semblant de
n'avoir rien entendu, et même quand il évitait de prendre pour
cible l'invité de l'émission parce que c'était quelqu'un de très
bien.
Mais si entretenir un blog et y publier
environ un article par semaine n'est déjà pas une sinécure, pondre
un billet d'humeur quotidien est un travail abrutissant qui exige de
l'imagination et nécessite de mettre du cœur à l'ouvrage même
quand on a la gueule de bois après une soirée trop arrosée, les
boyaux en capilotade à cause d'un en-cas avalé vite fait au
restaurant d'Ikea, les jambes en coton depuis les vingt kilomètres
de Bruxelles, les fesses en compote après avoir témérairement
participé à la dernière édition du « Beau Vélo de Ravel »
ou une insupportable crise d'hémorroïdes qui empêche de s'asseoir
devant son portable sans le secours de tous les oreillers disponibles
dans la maison.
Alors, fatalement, comme l'inspiration
ne se commande pas plus que la bandaison et l'humeur caustique pas
davantage que la disparition d'un mal de crâne persistant, on finit
par avoir recours à des ficelles pour remplir les pages nécessaires
à pondre un article qui ne donne pas à son auteur l'air d'un
incurable flemmard et, comme Thomas Gunzig dans son « Café
serré » matinal, on paraphrase, on délaie, on dilue
inlassablement en tournant autour du pot à l'aide de phrases
interminables truffées de propositions incises, de virgules, de
points-virgules et de conjonctions de coordination ; exactement
comme si l'objectif était de battre un record ou de faire croire aux
lecteurs et aux auditeurs qu'un esprit malveillant a fait disparaître
du clavier de l'ordinateur du chroniqueur les touches de ponctuation
lourde aussi indispensables à son texte que l'oxygène à un nageur
de crawl.
Il arrive parfois que des
commanditaires, conscients du fait que la tenue d'une rubrique
quotidienne est un travail exigeant, décident d'accorder au
chroniqueur un supplément de temps de réflexion en le dispensant de
temps à autre de remettre sa copie et en chargeant du boulot un
remplaçant plein de bonne volonté à défaut d'inspiration.
Thomas Gunzig peut donc compter assez
régulièrement sur l'intervention de quelque suppléant, comme Bert
Kruismans, par exemple, un Flamand qui possède plus d'humour que
d'arrogance ; et comme Laurence Bibot qui, bien souvent, me
donne à penser que si les trois poules que j'ai aimablement invitées
à squatter la cabane au fond de mon jardin décidaient de se lancer
toutes les trois ensemble dans un numéro de vocalises à vocation
prétendument comique, je leur tordrais immédiatement le cou, quitte
à jeter désormais dans le bac à compost les épluchures de pommes
et les déchets de salade, à terminer moi-même les dernières
bouchées de ma lasagne à la viande de cheval et à renoncer, en
guise de pénitence, à consommer des œufs jusqu'à la fin de mon
existence.
Laurence Bibot. Je ne sais pas pourquoi
je pense à elle en cette journée de la femme, autrement appelée
« journée des droits de la femme », alors que je ne
devrais pas, puisque pas plus tard que ce matin, j'entendais à la
radio une de ces dames expliquer à quel point notre monde est resté
machiste, à quel point les femmes sont brimées dans de nombreux
pays et à quel point les clichés de la petite fille jouant à la
poupée, de la demoiselle rêvant au prince charmant et de la mère
au foyer ont encore la vie dure aujourd'hui.
Je veux bien, moi, que les femmes
s'émancipent, qu'elles fassent de la politique, qu'elles boivent,
qu'elles fument, qu'elles dirigent des entreprises, qu'elles
gouvernent des pays, des bateaux ou des avions, qu'elles aient le
droit de faire tout ce que font les hommes – même pipi contre les
murs si ça les amuse – et de dire que les vieux clichés machistes
ne devraient plus avoir droit de cité.
Mais qu'on m'explique alors pourquoi,
si la domination du mâle est une vision passéiste, un bouquin comme
« Cinquante nuances de Grey » et ses deux suites
remportent un aussi grand succès auprès du lectorat féminin !
Et même si ce n'est juste que du
fantasme de bobonne, je ne peux m'empêcher de penser que la
phallocratie a encore de beaux, de très beaux jours devant elle.
" Mais qu'on m'explique alors pourquoi, si la domination du mâle est une vision passéiste, un bouquin comme « Cinquante nuances de Grey » et ses deux suites remportent un aussi grand succès auprès du lectorat féminin !
RépondreSupprimerEt même si ce n'est juste que du fantasme de bobonne, je ne peux m'empêcher de penser que la phallocratie a encore de beaux, de très beaux jours devant elle."
Tellement vrai !
Femme, bientôt 34 ans. Cernée par des femmes diplômées et actives, bonniches à tout faire de leurs bonzhoms, qui s'émeuvent du fait que je ne repasse pas les chemises de mon concubin.
Il semble que l'attitude actuelle des femmes, dans nos contrées, soit globalement de cette veine-là. Celles qui n'entrent pas dans ce moule se font plutôt radicales, crient fort et revendiquent jusqu'à l'extrême.
SupprimerGirl power !
RépondreSupprimerHummù ?!?
RépondreSupprimerM'enfin ? Tu as viré cette gentille pub ?
RépondreSupprimerÇa t'arrive souvent, des trucs comme ça ?
Hhuuuuh ?
SupprimerUne pub ? Où ça ? Où ça ?
Y a pas de pub sur mon blog. Sinon, je toucherais du pognon. Mais de toute façon, je ne suis pas à vendre.
Quoique...
Très cher, alors. Hors de prix.
Vous avez plein de femmes qui ont peur de n'être plus aimées, plus désirées par les hommes, peur d'être rejetées familialement, religieusement, socialement si elles osaient s'affirmer et refuser d'être bonniche du couple et de la famille, d'être objet sexuel, d'être seule à la barre des responsabilités et des obligations éducatives parentales.
RépondreSupprimerCette peur de n'être plus aimée, désirée parce que revendiquant une application réelle des droits des femmes entretient en partie la perpétuation de la domination masculine.
Et puis l'on a aussi le matraquage publicitaire qui ne présente des femmes toujours que trois critères: la mère, l'objet sexuel qui s'offre au désir masculin et la bonne ménagère. Comment dans ce contexte se définir différemment en terme d'identité? C'est compliqué pour beaucoup de femmes. D'autant que concernant le chapitre maternité, les femmes ayant été longtemps sans pouvoir parental, beaucoup de femmes d'aujourd'hui ont l'impression d'y puiser la seule légitimité sociale et identitaire et sexuelle. Sans la plupart du temps, mesurer que c'est le domaine principal qui leur est assigné par les hommes. Et qui permet toujours aux hommes de leur dénier le droit à exister et vivre autrement.
L'éducation scolaire des filles avance rapidement dans nos pays, mais très lentement dans l'immense majorité du monde. Et c'est à dessein que les filles sont peu instruites. L'instruction des filles leur donnerait une clé pour sortir de la domination masculine et beaucoup d'hommes ne souhaitent absolument pas qu'une telle chose se produise.
Pour que les choses changent, Choderlos de Laclos l'avait très bien dit il y a plusieurs siècles, cela dépend du seul courage immense des femmes. Les hommes ne peuvent pas être véritablement acteurs de ce changement car peu d'hommes militeraient pour la perte des privilèges que confère la domination masculine sociétale.
Quels ont été les propriétaires d'esclaves militant pour l'abolition de l'esclavage? Il n'y en pas eu beaucoup.
Quant à 50 nuances de gris, encore faudrait-il savoir quel type de lectorat féminin s'y adonne...et manifestement ce lectorat est si désespéré sexuellement, si peu comblé, que l'auteure a cru bon s'associer à un fabricant de sextoys pour vendre de quoi compléter les masturbations de celles qui lisent son bouquin. Preuve s'il en est d'une immense misère sexuelle des femmes adeptes de ce roman et preuve aussi d'une immense misère sexuelle de l'auteure.
Et ce n'est pas le BDSM qui favorisera l'accès des femmes à l'épanouissement sexuel et à l'émancipation...le sexisme y étant roi et la femme n'y jouant qu'un rôle d'objet.
En tout cas, quand j'étais à l'école, les filles étaient vachement balèzes, globalement, sauf peut-être en géographie où là, c'est vraiment très très rarement "leur truc". Mais question résultats, les mecs étaient enfumés.
SupprimerEt professionnellement, je bosse dans une entreprise où les hommes sont majoritaires, mais où les "cadres" sont majoritairement féminins.
Chez nous, en tout cas, ce n'est pas une question d'éducation. Dans d'autres pays, en effet, c'est une autre paire de manches.
Les filles ont effectivement souvent de meilleurs résultats scolaires que les garçons dans pas mal de pays du monde mais elles ont plus de difficulté à atteindre des postes de cadres -bravo à votre entreprise- et des salaires corrects et égaux aux hommes pour les mêmes postes et mêmes compétences dans la vie professionnelle (dans pas mal de pays y compris européens). Leurs bons résultats scolaires sont souvent inversement proportionnels à leur salaire plus tard.
SupprimerEt le fait d'avoir des enfants institue une double peine aux femmes qui grève souvent largement leur autonomie et leur survie notamment au moment de la vieillesse.
Sans compter hélas que dans pas mal de pays du monde, l'instruction scolaire des filles ne dépasse pas l'instruction primaire. C'était ainsi il y a 100 ans en Europe.
Les féministes ne sont que des idiotes aux service sur libéralisme marchand, car pour acheter, il faut un salaire, et une femme qui passe ses journées à éléver dignement ses enfants, ou participant aux travaux des champs pour la famille, n'a pas de salaire ni de carte bleue.
RépondreSupprimerQuand les femmes ne travaillaient pas pour un patron, le Grand Kapital était privé de la moitie de la population, qui ne produisait pas de valeurs marchande ni n'avait de salaire à dépenser dans la consommation.
Grâce au combat féministe ( ou à cause, tout dépend de quel bout du bâton merdeux l'on se trouve ), les femmes ont deux boulots, mère au foyer et en même temps, que salariée chez un patron.
Il parait évident que ce qui était en façade un combat pour la libération des femmes, n'a en fait été qu'une manière de mieux les asservir, faire d'elles des esclaves salariées à plein temps, pour jouir d'un pseudo état de liberté, réduit à la société de consommation à la con, de cosmétiques, de journaux féminins et de vêtements bas de gamme.
Le féminisme fut une chance pour le grand patronat,pour sûr, quant aux femmes...elle se sont bien fait entuber.
Se masculinisant, les femmes contemporaines, le cerveau lavé par des concepts féministes, souvent en confrontation avec les hommes, et se retrouvent souvent célibataires, élèvent seules leurs enfants, triste vie.
Malgré tout, elles pourrons toujours se remonter le moral en allant dépenser leur salaire de la peur, chez zara ou h&m pour des fringues bon marché fabriqués en Chine, qui est réservé à leur classe d'esclaves prolétarienne.